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23 février 2022 3 23 /02 /février /2022 21:01
Lorsque nous avons ouvert l'Ecritoile à la visite en janvier Frédérique qui présentait ses bouquins avait préparé à l'intention des visiteurs un petit atelier d'écriture. Sur un cahier elle avait démarré un texte posant le début d'une histoire, il s'agissait de poursuivre ce récit. Pas de contrainte, chacun était libre de laisser parler son imaginaire. J'ai joué le jeu mais personne ne s'est senti à ma suite de laisser libre cours à ses capacités créatrices.
Panne d'inspiration ?
Sans doute mais il en a été de même avec ma proposition. Pastels, fusains, sanguines sont restés sagement dans leurs étuis, personne n'a relevé le défi de la page blanche.
Quelques jours se sont écoulés, une idée me trottait en tête, je songeais à poursuivre le récit de ces aventuriers mais le verbe étant créateur j'ai préféré différer. Nous nous préparions avec notre groupe de randonneurs "Ramène Tes Godillots" à crapahuter du côté du Neulos et je ne tenais pas du tout à donner vie à l'aventure que j'avais concocté dans la fiction que voici... 
Dominique
 

Une aventure des "RTG"

Au terme d'une rude grimpette de près de deux heures la petite colonne des RTG* s'achemine tranquillement vers le col. (* Ramène tes godillots)

La chance leur sourit depuis le matin, un temps doux, sans vent et un soleil généreux laissant présager une halte pique-nique des plus agréables et un repos bien mérité.

Brusquement le chef de file s'arrête... L'un après l'autre, les marcheurs s'immobilisent derrière lui sur l'étroit sentier.

- Qu'est-ce que c'est que ça ? Fait le premier d'une voix intriguée.

Chacun lève les yeux en direction de son regard. Venue du col, une épaisse masse de nuages glisse le long du flanc de la montagne dans leur direction. En quelques minutes le soleil disparaît, le paysage se voile et un brouillard humide et frais les enveloppe.

§§§

Instantanément je tire sur la laisse du chien que je venais de rattacher pour traverser un troupeau de vaches. La queue basse il se laisse faire sans rechigner, lui qui d'habitude tient tant à sa liberté.

A mes côtés ma coéquipière, fan de rando, aguerrie aux situations quasi-extrêmes me regarde avec insistance. Je sens qu'elle essaie de me transmettre un message qui refuse de franchir ses lèvres.

Le chien décide pour nous !

Un bref écart et il fonce vers un amas de rochers que nous venions de dépasser, nous entraînant toutes les deux dans son sillage. Un petit rencoignement nous accueille juste au moment où nous constatons effarées que nous n'y voyons plus à deux mètres. Un silence ouaté nous enveloppe.

Pelotonnés tous les trois dans l'étroit réduit, nous nous abandonnons à une somnolence chaotique, le chien « collé-serré » contre nous. Un épais tapis de feuilles mortes nous isole du sol, pourtant le froid mordant nous transperce. Nous passons à l'action et je me décide à sortir ma cape de pluie prévue pour faire aussi office de tente. C'est le moment ou jamais. Les bâtons entrent en action pour confectionner un petit cocon. Les minutes s’égrainent lentement, nous n'osons même pas en profiter pour casser une petite croûte tant les circonstances sont "extra" ordinaires. Soudain le chien se relève et gronde, oreilles dressées. Il semble prêt à bondir quand un chuchotis nous fait sursauter exagérément et déchaîne de furieux aboiements. Nous risquons un œil hors de notre cachette, le brouillard semble moins dense !

Une silhouette émerge de derrière un arbre que nous n'avions même pas remarqué en fonçant vers nos rochers. Pourtant, vu sa taille, il n'est pas là d'hier. Nous reconnaissons un de nos coéquipiers de rando.

Nous giclons de notre abri pour nous porter à la rencontre de notre ami. Transi et très ébranlé il nous brosse ses mésaventures d'un débit haché. Réfugié au pied d'un bosquet de noisetiers lorsque la masse nuageuse l'a englouti, c'est au pied d'une souche tarabiscotée mais fraîchement coupée qu'il vient de se retrouver.

Une sensation d'étrangeté nous habite. Tout semble différent autour de nous et pourtant nous n'avons pas bougé d'un iota depuis que le brouillard est tombé. Un coup d’œil à notre topo de rando achève de nous convaincre que nous ne rêvons pas. Alors que nous devrions nous trouver au sein d'une vaste étendue herbeuse ponctuée de quelques hêtres rabougris et de noisetiers, nous sommes au cœur d'une zone boisée principalement de noisetiers.

A croire que nous avons été téléportés dans un autre lieu.

Des écharpes de brume s'accrochent à la végétation, le brouillard qui nous avait enseveli se dissipe aussi vite qu'il était apparu et sous le soleil revenu nous nous éloignons de notre abri. Nous endossons nos sacs à dos et cherchons à nous orienter. A priori le Neulos se trouve juste au-dessus de nous, pourtant si le sommet que nous apercevons en a l'allure globale, où sont passées les antennes ? 

Patrick, plus branché technologie que nous, semble subitement touché par la grâce. Il attrape son portable et frénétiquement multiplie les tentatives pour se connecter. Impossible d'activer le GPS. Je me décide à sortir ma bonne vieille boussole abandonnée au fond du sac. Carte IGN déployée, nous nous orientons, mémorisant le trajet parcouru au préalable, et plaçons la boussole en respectant les règles de l'art. Aucun doute n'est malheureusement possible, nous ne pouvons qu'être sous le sommet du Neulos.

Les pensées les plus folles nous traversent l'esprit. Et si nous avions subi une attaque nucléaire d'un nouveau genre ? Ou un coup de la station HAARPAprès la "plandémie" que nous venons de vivre nous sommes capables de tout envisager.

Nous nous décidons à gagner le sommet, Neulos ou pas, d’où nous devrions avoir une idée précise du lieu où nous nous trouvons. Sans compter que nous avons toutes les chances d'y retrouver nos coéquipiers de rando. Nous entamons la grimpette attentifs à ne pas perdre de vue le sommet. Par endroit les noisetiers forment une barrière difficilement franchissable ; à d'autres, curieusement, les bosquets semblent fraîchement coupés.

Soudainement nous nous figeons, des voix résonnent non loin. Nos amis bien sûr ! Nous pivotons prêts à nous porter à leur rencontre quand l'attitude de Sylvestre, le chien, nous intrigue. Queue basse il attend, sur le qui-vive !

Avisant un bouquet de noisetiers, nous filons nous cacher. Un groupe d'hommes s'acheminent vers nous. Pantalons de toile sombre, larges ceinture à la taille et amples vareuses, ces hommes qui portent sur le dos une sorte de hotte comme en avaient jadis les bûcherons, semblent sortis d'une gravure ancienne. Serions nous sur le lieu de tournage d’un film ?

Nous les laissons passer puis mettons discrètement nos pas dans les leurs. Nous oublions notre but et à leur suite nous découvrons éberlués le puits à neige, ce fameux Pou de Neu ! Devant nos yeux ahuris nous voyons ces hommes s'engouffrer à la base du puits et ressortirent les uns après les autres leurs hottes chargées de glace. De nouveau nous nous réfugions au sein de la végétation. L'étrangeté de la situation nous paralyse. Nous ne sommes pas sur un tournage de film : pas de caméra à l'horizon.

A la queue leu leu, les hommes repassent devant nous ; au loin un âne braie.
La curiosité l'emportant, nous les suivons à distance et les découvrons entrain de décharger la glace sur des charrettes menées par deux hommes armés de rapières.

Accablés nous nous affalons sur le sol. Si nous ne sommes pas sur un tournage de film, où sommes nous ? Et à quelle époque ?

Comment allons-nous retrouver les nôtres, notre vie ?

Nous nous levons en complète panique et, titubant, retournons vers le Pou de Neu. Nous avons maintes fois randonné en ces lieux ; à vue de nez, nous devrions pouvoir gagner la Font de la Tanyarède. Le refuge n'existe peut-être pas, - pas encore-, mais la source ne date pas d'hier, nous devrions pouvoir la trouver !

Au bout d'un temps infiniment long nous arrivons en vue de l'épaule rocheuse d'où la vue s'étend loin en terre Ibérique. La Font ne peut plus être bien loin. Nous descendons au sein de la hêtraie plus dense que jamais. Patrick emporté par son élan, bute sur une souche et au terme d'un roulé-boulé s'affale au seuil d'une clairière. Quelques cabanes aux toits de branchages mais parfaitement intégrées au sein de blocs de pierre en occupent l'espace. Elles ressemblent aux cabanes du ravin de Mata Porcs, un classique en matière de randonnée sur Laroque. Çà et là des morceaux de bois calciné jonchent le sol à côté d'un foyer éteint. Il est évident que des hommes et des femmes vivent là, mais quelle rusticité !

Les images du Puig Roig près d'Olot où nous avions découvert la reconstitution d'une place charbonnière me reviennent en mémoire. On s'y croirait !

Mais comment intégrer que je me suis levée en 2022 pour me retrouver quelques heures plus tard en... 1700, 1800 ? Combien de siècles en arrière ? Seul indice fiable, le puits à neige date du XVIIe siècle.

Aurions nous troqué Macron pour Louis XIV ? La Révolution Française est elle déjà consommée ou à venir ? Dans ce dernier cas nous pourrions peut-être suivre des cours de rattrapage ! Si nous retrouvons notre époque cela pourrait être utile.

Subitement le soleil se voile et un vent frais fait s'envoler quelques pièces de vêtements, des braies, si les souvenirs de mes cours d'histoire de naguère sont exacts. Un bref regard autour de nous et nous découvrons horrifiés qu'un nuage teinté de violet et de gris anthracite dévale vers nous. Nos réflexes jouant à fond nous investissons une des cabanes, en fermons la porte que nous bloquons d'une lourde planche avant de nous pelotonner tous les quatre sous une grande dalle installée entre deux blocs rocheux au fond de la cabane. La cape reprend du service.

Commence une attente fébrile.

Allons nous encore changer d'époque ?

Petit à petit nous sombrons dans le sommeil, dehors le vent mugit.

§§§

Je me réveille en sursaut, le silence nous enveloppe à peine ponctué par les cris des geais. A mes côtés Sylvestre dort comme un bienheureux. Le découvrir si serein me fait un bien fou ! Subitement, je sens la tension qui me vrillait le plexus lâcher prise. J'écarte le tissu de la cape.

Un cri jaillit de ma gorge, le vent a eu raison des cabanes, seule la grande dalle a tenu le coup. Autour de nous plus rien, hormis des hêtres. Nous émergeons incrédules, les mots peinent à franchir nos lèvres !

Quand est on ?

Seul Sylvestre semble fringant, il va de l'un à l'autre dispensant des lichettes à la compagnie, quand subitement nous le voyons filer vers mon sac à dos et stopper net, l'oreille aux aguets. Sa tête pivote sur elle-même lentement, il écoute... Le vibreur de mon téléphone portable !

Le temps d'intégrer le miracle qui est entrain de se passer, l'appel a cessé pour être remplacé par une avalanche de SMS ! Une explosion de joie nous propulse dans les bras les uns des autres, nous avons réintégré notre époque.

Sauf si nous avons fait un bond dans le futur !

Dominique

 

 

 
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20 décembre 2021 1 20 /12 /décembre /2021 18:15

Coucou! Je sais que la plupart des gens n'aiment pas trop lire, surtout si les textes sont un peu longs... Bon tant pis... Je tente le coup! Voilà une petite nouvelle que j'avais écrite en janvier 2014, bien avant la crise actuelle... On peut voir que le thème de la décroissance me tenait déjà à cœur! Toujours est-il qu'elle me semble être plus que jamais d'actualité, d'autant que tout a déjà bien empiré! Par exemple, les trois vac- cins obligatoires pour les enfants sont passés à onze... Et il s'en profile un nouveau des plus inquiétants ; je ne le nommerai pas, vous avez compris!

 

Je remercie d'avance tous ceux qui auront la curiosité, le courage (?) de lire jusqu'au bout et de me me faire un petit retour! Andavant! Et il y aura une interro écrite!!! Ah, ah, ah!!!

 

Frédérique

 

No Pasaran !*

(On espère bien que si !...)

Les deux mains posées à plat devant lui, le président Sarkhollandzy balaya d’un regard circulaire l’assemblée de ses ministres. Sous son regard sévère, peu à peu, le brouhaha des voix diminua jusqu’à s’éteindre tout à fait, laissant place à un silence craintif et respectueux.

- Mesdames et messieurs, je vous ai rassemblés aujourd’hui pour ce conseil des ministres exceptionnel afin de faire le point sur une situation préoccupante que nous avons déjà évoquée ici-même plusieurs fois. Depuis plusieurs semaines, chacun, dans son domaine, a donc travaillé afin de dresser un état des lieux. Le moment est venu, mesdames, messieurs, de faire le point ensemble, d’en tirer les conclusions qui s’imposent et d’établir un plan d’attaque afin de contrer les tendances émergentes dévastatrices qui nous préoccupent tout particulièrement. Je vais donc donner la parole à Monsieur le ministre de l’intérieur qui va nous faire un exposé général de la situation.

Petit et rond, Emmanuel Tazère de la Gachaite se redressa vivement à l’appel de son nom, esquissant un petit salut à l’adresse de son supérieur hiérarchique avant d’ouvrir son dossier et de prendre la parole en se raclant la gorge :

- Je vous remercie, monsieur le président. Je vais commencer par un bref rappel de la situation, si vous le voulez bien. Il y a quelques mois, nous avons été alertés au sujet d’un phénomène culturel inquiétant ayant vu le jour dans nos campagnes et ayant une fâcheuse tendance à se généraliser. Nous avons tous entendu parler de monnaies locales, d’échanges de services, et autres petits arrangements locaux qui se font ici ou là en marge de l’économie traditionnelle. Ce sont des fonctionnements marginaux qui existent depuis fort longtemps et qui n’ont jamais suscité la moindre inquiétude, justement parce qu’ils restaient marginaux. Or voilà que depuis quelques temps, plusieurs semaines, voire même plusieurs mois, ces initiatives locales ont tendance à prendre une ampleur préoccupante. Bien entendu, lorsque nous avons commencé à constater que le phénomène s’amplifiait, les médias ont reçu l’ordre de cesser la publicité involontaire qu’elles leur apportaient afin de tenter d’enrayer l’épidémie. Hélas, vous savez bien sûr qu’il est très difficile de contrôler de la même façon les informations qui circulent sur le net et c’est évidemment de cette manière que le processus a pu s’accélérer jusqu’à arriver à la situation de crise que nous connaissons aujourd’hui. Mais je pense que madame le ministre de l’économie et des finances en parlera mieux que moi.

Face au ministre de l’intérieur, une longue dame brune aux cheveux sagement regroupés en chignon sur la nuque, se prépara prestement à prendre la suite de son collègue, mais le président, qui avait pris quelques notes au cours de l’intervention du ministre de l’intérieur, l’arrêta d’un geste discret :

- Juste une question, avant votre intervention, madame du Flouze, si vous le permettez ! Monsieur le ministre de l’intérieur, vous avez parlé de plusieurs semaines, voire même plusieurs mois… Ne peut-on parler d’années, dans certains cas ?

Le ministre de l’intérieur rougit comme un élève pris en faute :

- Tout à fait, monsieur le président, dans certains endroits, on peut effectivement dire que cela dure depuis des années.

- Merci. Madame, c’est à vous…

Un peu déstabilisée par cette intervention, Marilyne du Flouze, ministre de l’économie, attaqua son exposé en bégayant un peu :

- Oui… Hé bien, oui… Merci, monsieur le président. Effectivement, tout a commencé il y a quelques années dans certains petits villages de nos provinces… En Bretagne, mais aussi en Ardèche et en Ariège plus particulièrement. Les populations ont commencé à s’organiser au niveau local pour lutter contre la crise. Remplaçant progressivement les monnaies locales déjà existantes, l’échange de service est devenu le fondement de ces microsociétés. Avec un principe de base incontournable : limiter les transactions monétaires au maximum. Les valeurs avancées étaient et sont toujours : le partage, l’échange, la circulation des objets, l’entraide et la confiance. Une large place est laissée, bien sûr, au bénévolat.

Le président hocha la tête d’un air entendu :

- Oui, pour l’anecdote, j’ai entendu dire qu’un journal acheté circulait ainsi de famille en famille… De même pour les livres ; il est parait-il question de bibliothèques communautaires où le prêt de livre est totalement gratuit… On offre ses compétences, on en reçoit d’autres…

- Tout à fait. Même les vides-greniers fonctionnent sans que ne soit échangé un cent ! On fait la chasse au gaspi. Rien n’est jeté, tout est recyclé !

Au bout de la table, une petite main se leva. Elle appartenait à une jeune femme blonde aux cheveux fins tombant sur les épaules.

- Il semblerait que madame le ministre de l’écologie veuille intervenir, commenta Jacques François Sarkhollandzy. Madame, on vous écoute.

- Merci, monsieur le président… En effet, j’ai l’impression, madame le ministre, que vous déplorez cette attitude… Pour ma part, je suis à cent pour cent pour le recyclage. On jette tellement facilement, de nos jours !

- Je comprends votre remarque, madame Hulotte Pastouret. Moi-même, à titre personnel, je m’inscris tout à fait dans cette démarche, mais vous comprenez bien, madame, que ce qui est louable tant que cela reste un phénomène isolé, peut devenir catastrophique au niveau économique lorsqu’il se généralise. Car ces gens là n’ont qu’un seul mot à la bouche : non consommation. Pour eux, ce qui ne peut être réutilisé, composté ou recyclé ne devrait pas exister. Durabilité, réparabilité et mobilité durable. Que cette épidémie en vienne à toucher les grandes métropoles et c’est tout notre système économique qui s’effondre ! Que dis-je, notre système économique… Le système économique mondial, en vérité !

Baissant la tête, Nicole Hulotte Pastouret esquissa une moue dubitative.

- Vous trouvez que j’exagère, madame ? Sachez que ce mouvement s’accompagne d’une idéologie particulièrement redoutable pour nos industries. Les adeptes de cette nouvelle philosophie prônent les économies d’énergie comme seul moyen de lutte contre la raréfaction des ressources. Mais loin de se laisser séduire par les énergies propres, chères en investissement pour une rentabilité lointaine et parfois douteuse, leur solution consiste donc à limiter au maximum la consommation, à commencer par le nombre d’appareils électriques… Oui, cela parait simpliste, mais le secteur électroménager en est tout particulièrement touché! Les enquêtes menées sur place par nos agents montrent que ces individus ont réussi à réduire considérablement leur facture d’électricité, en dépit des augmentations conséquentes de ces derniers mois. Et sans aucune perte de qualité de vie. Disent-ils.

Assis à la droite du ministre de l’économie, le ministre des communications leva le bras avec impatience. Aussitôt, le président l’invita à s’exprimer d’un geste significatif. Solimane Ng’allo s’exécuta d’une voix puissante :

- Le secteur électroménager n’est pas le seul touché, monsieur le président. On note une forte baisse de consommation dans la téléphonie mobile au cours des derniers mois. Les abonnements Internet eux-mêmes accusent une courbe décroissante. Il y a semble-t-il, une volonté évidente de s’affranchir de ces technologies, jugées trop invasives par ces populations, que l’on dit rurales à tort, car il s’agit pour beaucoup d’anciens citadins. On compte aussi de plus en plus de foyers sans télévision dans les zones les plus touchées.

- Sans télévision ? fit la voix incrédule de Marcel Peyre-Pette, ministre de la justice.

Solimane Ng’Allo confirma d’un air solennel :

- Absolument. Sans télévision. Il y a d’ailleurs une forte baisse des redevances cette année. Les personnes interrogées ont expliquées qu’elles en avaient assez des programmes sans intérêt diffusés à longueur de journée sur le petit écran, allant même jusqu’à les qualifier de débiles. Mêmes les journaux télévisés, pour eux, n’ont plus matière à informer, mais plutôt à désinformer.

- Ces gens-là ne s’informent plus ? questionna le président interloqué.

- Détrompez-vous, monsieur Sarkhollandzy. Ils sont très bien informés.

Solimane Ng’Allo baissa la voix pour ajouter :

- Beaucoup mieux que les autres, en fait, monsieur le Président.

Quelques ricanements et commentaires interrompirent un instant le cours du conseil. Le président se retourna d’un air agacé vers son ministre de l’économie et des finances :

- Dans ce contexte, madame du Flouze, j’imagine que le secteur automobile accuse une certaine baisse de forme ?

- Absolument, monsieur le Président. La vente des voitures neuves a baissé partout, certes, mais plus particulièrement dans les zones rurales, là où les populations sont pourtant censées avoir le plus besoin d’un véhicule. Les gens hésitent à changer de voiture en dépit de primes à la casse, boudent les modèles trop sophistiqués, gardent plus longtemps leurs vieux véhicules, s’organisent entre eux, pratiquent le covoiturage… On remarque par ailleurs que dans ce domaine, ils évitent les sites internet consacrés à ce système. L’indépendance est leur crédo. L’autonomie, également. La fréquentation des grandes surfaces est en baisse, au profit des petits producteurs locaux. Les commerces de proximité sont favorisés et beaucoup disent que la réduction des frais de transports compense les prix plus élevés que dans la grande distribution, d’autant que les produits sont de meilleure qualité. Ils prônent le manger moins pour manger mieux !

Un silence méditatif s’installa dans l’assemblée. Le président promena un regard circulaire autour de lui avant de s’arrêter sur une petite femme boulotte dont le visage rond était auréolé de cheveux gris courts et bouclés.

- Que pensez-vous de tout cela, madame le ministre des solidarités ?

La bouche pincée, Elisabeth Donnadieu prit une longue inspiration destinée à se ménager quelques instants de réflexion, d’autant que son avis risquait fort de déplaire à beaucoup.

- Hé bien, monsieur le président, on peut dire que ces populations ont compris le sens du mot solidarité. Cette idée de ressources communes est intéressante. Ils remettent au goût du jour des valeurs trop souvent bafouées au cours des dernières décennies. J’ai entendu dire que les lieux publics étaient transformés en potagers communautaires… Les personnes démunies sont prises en charge au niveau des communes grâce à une très large implication de personnes bénévoles, chômeurs et retraités… Tout cela ressemble à une société idéale.

Pierre Glaiseux, le ministre de l’agriculture, chauve et bedonnant, bondit littéralement de son siège, le visage congestionné de colère :

- Mais totalement utopique, madame Donnadieu ! Complètement utopique ! Et qui plus est, à la limite de la légalité ! Ces gens ignorent tout bien sûr du catalogue des plans autorisés par la communauté européenne ! On ne cultive pas n’importe quoi, de nos jours ! Vos joyeux hurluberlus ont-ils seulement pris conscience de leurs responsabilités vis-à-vis de l’avenir de la société ?!

Elisabeth Donnadieu fusilla son collègue de son regard bleu :

- Beaucoup plus que certains, monsieur Glaiseux, répondit-elle froidement.

Le président réagit promptement pour ramener la paix dans des esprits qui s’échauffaient visiblement un peu trop :

- Allons, allons, du calme, je vous prie ! Monsieur Lebac, s’il vous plaît, avez-vous des remarques à faire de votre côté, en ce qui concerne l’Education ? Nous vous écoutons.

Le ministre de l’Education Nationale adressa un regard de reconnaissance au président et se pencha sur ses notes :

- Le constat est assez inquiétant, monsieur le président. Cette année, de nombreuses fermetures de classes ont dû intervenir dans les zones concernées. On constate en effet une forte chute des effectifs dans la plupart des écoles.

- Comment cela se fait-il ? fit le président, visiblement étonné. Aucune baisse de natalité n’a pourtant été signalée au cours des années précédentes !

- Non, effectivement. Les parents retirent leurs enfants de l’école. L’école ne les satisfait plus. Beaucoup vont dans le privé… Et, il y a un très fort engouement pour l’éducation en famille.

A ses mots, Sébastien Lussape, ministre de la jeunesse et des sports demanda la parole.

- On constate le même phénomène au niveau des activités périscolaires, monsieur le président… Les familles s’organisent entre elles pour garder les enfants en dehors du temps scolaire. Ni l’école, ni les centres de loisirs ne semblent plus répondre aux attentes des familles.

- Que leur reproche-t-on ?

- Pour l’école, un appauvrissement de la culture générale et une regrettable uniformisation des acquis. Quant aux activités périscolaires, s’agissant de petites communes ayant peu de moyens, il ne s’agit généralement que de garderies.

- J’ai entendu dire au cours de mon enquête, monsieur le Président, reprit Lionel Lebac, que l’école n’apprenait plus aux enfants à réfléchir, mais qu’elle cherchait au contraire à formater des individus faciles à manipuler par des gouvernements peu scrupuleux, des moutons, en quelques sortes…

- Qu’est-ce que c’est que ces conneries ? s’écria le ministre du travail d’une voix forte.

- Je vous en prie, monsieur Orsoni ! Gronda le président. Maîtrisez vos paroles, s’il vous plaît !... Bien, tout cela est inquiétant, effectivement. Et vous, madame Achivé ? Quel constat du côté de la santé s’il vous plaît ?

L’expression grave et solennelle de Roselyne Achivé était déjà une réponse en soi.

- Même constat, hélas, monsieur Sarkhollandzy. Comme dans le domaine de l’éducation, on remarque des familles désireuses de s’affranchir d’un système qui a pourtant toujours fait ses preuves. Le phénomène le plus significatif est sans doute celui des vac-cins… Le refus de vac-cination est de plus en plus fréquent, notamment le refus des vaccinations polyvalentes…

- Comment cela, refus de vac-cination ? s’indigna le président Sarkhollandzy. Et comment ces familles peuvent-elles se soustraire à ces obligations ?

- C’est qu’il n’y a pas de réelle obligation, monsieur le président. Légalement, seuls la diphtérie, le tétanos et la polyo sont obligatoires… Primo vaccination et premier rappel seulement. Tout le reste n’est que recommandé.

- Hé bien il va falloir y remédier, répondit vivement le président. Le plus rapidement possible. Voilà au moins une chose qui ne parait pas trop compliquée.

- Hum… Mais qui nécessitera un certain doigté ! Par ailleurs, je voulais ajouter que les populations concernées par le phénomène que nous évoquons sont plus enclines à pratiquer les médecines douces, l’automédication par les plantes…

- L’Europe a déjà pris conscience du problème et des mesures sont en cours à ce sujet, coupa sèchement le président.

- C’est exact. Mais il y a aussi cette attirance pour les médecines parallèles, guérisseurs, chiropracteurs…

- On se croirait revenu au Moyen-Age, ne put s’empêcher de ricaner le ministre de l’Intérieur.

- Vous ne croyez pas si bien dire, riposta Roselyne Achivé, également en charge du ministère des affaires sociales. Car ce phénomène de société va très loin et on assiste à une modification profonde des comportements. Les croyances évoluent également considérablement. La baisse de fréquentation des églises est un fait acquis depuis de longues années, dans ces régions, comme ailleurs. Mais les enquêtes ont révélé que ces populations évoluaient inexorablement vers une spiritualité indépendante… Beaucoup ont avoué pratiquer la méditation, insistant sur l’importance de cultiver la pensée positive. C’est pour cette raison, du reste, que beaucoup en viennent à bouder ces médias qui véhiculent trop volontiers la peur et les catastrophes… Comprenez-bien que dans ce contexte, nous n’avons plus aucune prise sur ces gens !

Un silence prolongé s’installa au sein de l’assistance accablé par l’ampleur du problème. Le président méditait et tous semblaient attendre une réaction de sa part. Elle vint enfin, provoquant un soulagement général :

- Hé bien messieurs dames, nous allons donc relancer la chasse aux sorcières ! Nous allons fouiller, débusquer, sanctionner et ramener tout ce joli monde dans le droit chemin de la consommation et de la croissance ! Mais dans un premier temps, il faut enrayer l’épidémie… Nous avons parlé des campagnes… Les villes sont-elles atteintes, monsieur Tazère de la Gachaite ?

- Certains quartiers, monsieur le président. Oui, on peut dire que les villes commencent à être touchées, elles aussi.

- Bien. Il nous faut tout particulièrement surveiller ce qui circule sur le net. Lancer des alertes avec des mots-clé ciblés… Eplucher les sites, les blogs, les courriels… Tout. Nous allons retrousser nos manches et légiférer, censurer, in-ter-dire ! Chacun va donc poursuivre le travail en imaginant les moyens de répression adaptés aux problèmes que nous avons évoqué. Monsieur Lebac, le problème de l’école est primordial. C’est là que tout commence, n’est-ce pas ? Il y a longtemps que nous aurions dû nous intéresser au sort de l’éducation en famille… Désormais, ce n’est pas l’enseignement qui doit être obligatoire… C’est l’école. Et pour ce qui est de la santé, secteur particulièrement sensible également, ou en est cette soi-disant pandémie en Chine ?...

Roselyne Achivé fronça les sourcils :

- Hé bien il semblerait qu’il s’agisse d’une mauvaise plaisanterie…

Le président opina lentement du chef en réfléchissant intensément.

- Dommage… Mais je pense… qu’en utilisant judicieusement le réseau Internet, nous pourrions peut-être faire en sorte que cela devienne une réalité…

D’abord interloqués, les ministres échangèrent des regards incrédules, voire désapprobateurs pour certains.

Le président se fit sévère et déterminé :

- Comprenez-moi bien, mesdames et messieurs ! Seule la peur peut ramener ces brebis égarées au bercail. Il faut qu’elles se sentent menacées dans ce qu’elles ont de plus précieux, leur santé. Et nous apparaîtrons alors comme des sauveurs ! Dites-vous bien que l’heure n’est plus aux scrupules. Nous sommes entrés dans une logique de guerre. Nous faisons la guerre à une secte d’ampleur nationale. Nous ne devons rien laisser au hasard. Il en va de la grandeur de l'état. La tâche sera rude.

Un silence accablé accueillit cette déclaration. Le président se redressa, gonflé de toute l’importance de sa fonction :

- Mesdames et messieurs, la séance est close. Nous nous retrouverons dans trois jours pour un nouveau point. Je vous remercie.
 

* « No pasaran ! », pour ceux qui l’ignorent, est le célèbre slogan prononcé par les républicains espagnols en lutte contre franquistes.

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1 novembre 2021 1 01 /11 /novembre /2021 17:58

Cette petite nouvelle sans prétention est dédiée à tous ceux qui souffrent de mal être, de maux divers plus ou moins graves.

Notre corps encaisse plus ou moins stoïquement, silencieusement puis s'exprime, comme il peut. Il trouve des maux pour le dire. La maladie !

Généralistes, spécialistes se relaient à notre chevet, sans grand succès, puis, parfois, Euréka !

Un déclic s'opère et nous comprenons que notre corps nous parle ... que rien n'est fatalité ... que même si nos ascendants semblent "se refiler" le même mal, nous n'avons pas nécessairement à en souffrir, la génétique n'ayant rien à voir là dedans !

Nous admettons que tout est possible, qu'il n'y a rien d'immuable, et là c'est gagné.

Il n'y a plus qu'à remonter le cours de la vie et écouter notre corps, nos ressentis, laisser parler notre âme !

Renaissance

Ce matin quelque chose de neuf vibre dans l'air.

Je regarde par la fenêtre et je vois, ce que je n'avais encore jamais vu. Tout a changé et pourtant je sais bien qu'il n'en est rien.

Doucement je pivote et sans me presser je gagne l'étage.

Par où commencer ?

Aller à l'essentiel dans un premier temps.

J'attrape un de mes vieux sacs à dos puis méthodiquement je dépose sur le lit mes cahiers de gratitude, mes vieux agendas, le disque dur où je compile depuis des années tous ces documents qui témoignent mieux qu'un long discours du chemin accompli pour me découvrir, celui où sont stockés photos et films. Après avoir évalué la stratégie adéquate le remplissage commence. Au prix d'un dernier petit effort, j'arrive même à y loger le gros classeur où depuis dix ans je range toutes les notes prises lors d'interrogations au pendule.

Assise sur le lit je laisse un instant mon regard errer puis, déterminée, c'est au tour du contenu de l'argentier de passer au crible. Il y a quelque temps encore cela m'aurait demandé un incroyable effort d'opérer un tri parmi toutes mes « petites choses ». Là, plus question de s'encombrer avec les vieilles loyautés familiales et amicales, Pierrot ne sera pas du voyage, ni les vieux appareils photos. Un peu plus tard peut-être, aujourd'hui j'ai court-circuité le mental. Rapidement mon vieux cartable en cuir affiche complet.

Reste le plus délicat, le contenu de l'armoire !

Aucun tri à opérer, tout suit, reste à me concilier les faveurs de la belle Delsey rouge. Elle n'aura pas trop de soufflets pour tout avaler. Silencieusement je persévère dans mon entreprise, rien ne semble devoir me troubler, pas même la sonnerie de mon téléphone. Pour la troisième fois, en moins d'un quart d'heure, elle retentit quelque part au rez de chaussée.

Pas de message, sans doute rien d'important, à moins que ce soit ma voisine à la recherche d'un chauffeur !

Tant pis !

Ce ne sera pas moi !

De toute façon elle va devoir se trouver quelqu'un d'autre.

Depuis mon lever les choses ont considérablement avancé. La Delsey, le sac à dos, le vieux cartable ont trouvé leur place à l'arrière du Berlingo en compagnie de quelques cartons dans lesquels j'ai remisé livres, CD et DVD favoris.

Sur le coup de 14h, foudroyée par une vieille faim, j'avale sur le pouce quatre fruits, un sandwich au fromage et deux carreaux de chocolat. Je n'ai plus de temps à perdre. Je suis une ado attardée qui s'apprête à fuguer. J'ai juste un peu plus d'expérience qu'elle et je ne perds pas de vue le côté matériel de l'entreprise.

Et puis je sais où je vais.

Je retourne chez moi.

Définitivement.

Il y a si longtemps que j'en suis partie.

Rien à voir avec un coup de tête, plutôt une prise de conscience après une longue maturation ! J'ai enfin cessé de faire la sourde oreille, j'ai entendu ce que mon corps me disait, me criait avec insistance. Il m'a fallu du temps pour comprendre, vingt, trente ans ?

Mais la Vie veillait. Lorsqu'une amie m'a parlé de "son" acupunctrice, n'ayant plus rien à perdre, complètement démoralisée par une expérience dévastatrice auprès d'un psychothérapeute, je me suis lancée.

Préparée à devoir attendre un bon moment avant de pouvoir la rencontrer, un désistement inespéré m'a réconfortée. Comment ne pas en déduire que c'était le cadeau que la vie m'adressait.

Deux jours après je me retrouvais auprès d'une petite bonne femme joviale qui m'invitait à m'asseoir à ses côtés sur un canapé douillet. D'un coup la tension qui m'habitait est tombée et avec gratitude j'ai accepté et vidé le verre d'eau qu'elle me proposait. Une conversation informelle, en apparence, s'est engagée, rien de médical. Ce que j'aimais, mes dernières lectures, les souvenirs agréables qui coloraient ma vie. Puis sans transition elle m'a demandé de lui prêter mon poignet droit ... et là je suis restée complètement baba. On se serait cru dans une réplique du Malade Imaginaire ... "Le foie vous dis-je". Et oui depuis des années, j'ai mal au foie ! Je digère mal, j'ai des crampes au niveau du diaphragme, des douleurs sourdes, piquantes ou fulgurantes. Pourtant, pour le corps médical, je n'ai rien !

De grave !

Mais cela me pourrit la vie !

Allez au restaurant, être invitée, voyager, tout ce qui met du piment dans la vie m'est un supplice. Je crains toujours de faire le mauvais choix, d'être un fardeau pour les autres qui d'ailleurs ne ménagent pas les petites piques désagréables.

Petit à petit, alors que je ne lui avais rien dit de ce qui m'amenait à la consulter la thérapeute a dressé le tableau de tout ce qui me gâche la vie en plus de mes problèmes digestifs. Des tendons défaillants, une difficulté récurrente à savoir ce que je veux, à décider et donc le sentiment de toujours m'effacer devant les autres. La consultation a pris un tour plus en accord avec ce que j'imaginais et je me suis retrouvée en petite tenue sur la table de soin. Au terme d'un second examen minutieux, la séance d'acupuncture a démarré.

Je commençais juste à me détendre quand une décharge électrique m'a vrillé un nerf au niveau du gros orteil, une onde de feu a remonté le long de la jambe, passé l'aine et dans la seconde qui suivait au niveau du creux épigastrique un infâme glouglou a retenti. On aurait dit un évier qui se débouche !

Ma "tortionnaire" a émis un "ah" jubilatoire avant de m'expliquer que mon corps venait de s'exprimer et confirmer ainsi son diagnostic.

Aucune pathologie grave en effet, juste une vieille colère que ma vésicule biliaire ne pouvait plus gérer d'où tous les désordres déplorés qui, le temps passant, s'amplifiaient. Mon corps mettait les points sur les i, en vain. Je suis restée à méditer ce constat pendant qu'elle se livrait au niveau du crâne à un massage divin qui a bien failli m'emporter dans les bras de Morphée.

En Colère !

Moi ?

Comment le nier ?

En colère de ne pas vivre ce que je voudrais vivre, de ne pas savoir imposer mes goûts et points de vue, de faire toujours le choix du raisonnable, de vivre là où je n'ai pas choisi !

Oui il y a en moi de la rancœur, de la rancune, des regrets qui nourrissent une aigreur dont jusqu'à cet instant je n'avais pas pris conscience. Je me croyais sage, raisonnable. Une part de moi l'était sans doute !

L'abcès a crevé d'un coup, un flot de larmes a jailli, des borborygmes inintelligibles l'accompagnaient. Madeline Romesco m'a laissée sangloter puis m'a tendu une boîte de mouchoirs, un nouveau verre d'eau bienvenu et m'a expliqué ce que mon corps tentait vainement de me dire, à sa manière. Il est évident qu'une part de moi savait déjà tout cela mais que jamais je ne me serais autorisée à l'exprimer et encore moins à passer à l'action. J'ai compris à cet instant que mon tourisme médical, une quête qui ne disait pas son nom, n'avait qu'un but. J'attendais qu'un médecin me révèle aussi clairement que Madeline et ses aiguilles qu'il était temps de me réveiller et de me donner les moyens de vivre ma vie.

Aujourd'hui je suis sortie de la colère car j'ai compris que je me suis incarnée pour faire l'expérience de cette vie et que toute expérience comporte un grand nombre d'étapes. Comme le chercheur confronté à un échec considère le déroulé de son expérience point par point, analyse les causes de son insuccès et modifie les paramètres pour reprendre ensuite le cours des choses, les mêmes causes produisant toujours les mêmes effets, j'ai reconsidéré ce que fut ma vie jusqu'à ce jour.

Je n'ai pas eu longtemps à chercher, je n'ai même pas eu à prendre beaucoup de recul pour analyser chaque difficulté rencontrée et comprendre ce qui était à modifier.

Voilà pourquoi je rentre chez moi !

Je suis une fille du Sud et si je vis depuis des années sur la côte atlantique, ce n'est pas par goût. Ce fut par Amour, par habitude ensuite, puis pour ne pas faire de peine, pour rester utile aux miens. La Lassitude a été ma geôlière. Impossible de faire entendre à ma famille que mon Midi me manquait. Je crevais de peine à chaque fin de vacances lorsque nous reprenions l'Autoroute des Deux Mers. Aujourd'hui, la messe est dite. Je ne les abandonne pas, je me choisis. Je retournerai auprès d'eux pour le plaisir mais ma vie n'est plus à leur côté. Dans un premier temps je m'offre le rêve de ma vie, un joli bungalow qui par la suite pourra les accueillir le temps de leurs vacances même si leur venue n'est pas pour demain. Mon départ déplaît, je suis en quelque sorte punie de vouloir vivre ma vie, mais peu importe.

J'ai déjà une foule de projets dont certains sont en passe de concrétisation, des portes s'ouvrent comme pas magie. Aide toi, le Ciel t'aidera ! C'est ma réalité, la vie m'a offert sur un plateau l'occasion de passer à l'action.

Le mobilier que je souhaite conserver va partir au garde-meubles, les enfants choisiront parmi ce que je laisse. Ce qui n'aura pas trouvé preneur sera donné, la maison vendue !

Je renais au soleil de mon midi, rien n'est impossible quand on s'aime !

S'aimer !

Cela n'a rien d'égoïste, cela est même ce que l'on peut offrir de meilleur aux autres, à l'Univers !

Dominique

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11 juillet 2021 7 11 /07 /juillet /2021 20:12

Voilà, je ne résiste pas à la joie vous faire partager la nouvelle dont Frédérique m’a fait cadeau pour mon joyeux anniversaire !

Cela a été pour moi un moment d’une intense émotion que j’ai eu envie, avec son assentiment de vous offrir !

N’est-ce pas en fait le principe du Don qui prend tout son sens quand il débouche sur le « re » Don !

Je l’ai intitulé « En coulisse », elle n’avait pas été baptisée, j’imagine qu’arrivé à la fin, vous comprendrez pourquoi !

C’est une tranche de vie, peu banale, et que pourtant nous avons déjà tous vécu, c’est en tout cas ma conviction !

Les personnages dessinent subtilement la trame d’un drame, en ce sens que l’on voit brosser à petites touches les multiples tonalités qui composent une vie et si leurs prénoms peuvent surprendre, ils leur collent à la peau !

Je ne vous en dis pas plus mais j’aimerais vraiment avoir des retours car j’ai tant de choses à ajouter !

En coulisses

- Ça y est, jubile Néroli, Rose et Yuzu ont enfin réussi à se retrouver ! Elle l’a vu passer dans la rue et elle l’a reconnu au premier coup d’œil ! Je crois que cette fois nous sommes enfin tirées d’affaire !

Litsée pousse un gros soupir de soulagement, mains jointes, yeux levés vers le ciel en signe de remerciement :

- Ah ! Formidable ! Notre petite famille est sauvée ! Elle nous aura bien fait peur avec son Coco. Elle avait beau se rendre compte que ce n’était pas lui le bon, elle aura duré, cette histoire ! On était mal partis…

- Tu l’as dit… Remarque, c’est comme Yuzu, avec Sarriette, sa première femme. D’accord, on ne peut pas dire que c’était une erreur, puisqu’il n’y a pas d’erreur ; il n’y a que des expériences. Il n’empêche que ça ne va pas nous simplifier l’existence.

- C’est certain, mais c’était prévu, souviens-toi ! On en a longuement parlé tous ensemble. C’est un passage obligé pour Yuzu… Pour nous tous, d’ailleurs.

Litsée opine vigoureusement du chef :

- Oui, même s’il y a eu des égarements, on peut dire qu’ils faisaient parti du plan.

- Exact ! Enfin, on peut dire « ouf » quand même. Je suis bien contente.

- Et moi donc !

Malgré tout, le sourire de Litsée s’efface rapidement. La voilà songeuse, et contre toute attente, vaguement contrariée.

- Sauf que maintenant, il va falloir y aller.

Néroli secoue la tête, rassurante :

- On a encore un peu de temps devant nous !

- Toi, surtout ! riposte Litsée. Moi, ça va être plus rapide ! Et je suis de moins en moins sûre d’avoir envie de m’y recoller !

Néroli se rembrunit à son tour :

- Je te comprends. Moi aussi, en fait.

Elle soupire bruyamment :

- Mais il faut voir le bon côté des choses : la période est plutôt favorable. La guerre est terminée et le progrès est en marche avec plein d’inventions géniales pour faciliter la vie des gens, des femmes en particulier. Une sorte d’eldorado de la liberté… On a de la chance.

- Le progrès, objecte Litsée, l’air sombre ; il n’y a pas que des belles choses dans le progrès ! Regarde la bombe atomique !

- Bien sûr, le progrès, c’est tout l’un ou tout l’autre. Je sais que ça pourrait aussi détruire la planète ! Mais on ne va pas voir tout en noir et moi je pensais déjà à ce qu’à vécu Rose.

Litsée l’interrompt :

- Tu ne devrais plus dire Rose…

- Oh, je sais, mais je préfère continuer à l’appeler comme ça. En tous les cas, regarde, elle a dû traverser deux guerres ! Et puis franchement, elle n’a pas cherché la facilité en choisissant sa famille et ses origines. D’ailleurs, plus j’y réfléchis et plus je me dis qu’on aura intérêt à se serrer les coudes parce qu’ils vont nous donner du fil à retordre ! C’est du lourd, les ancêtres !

Litsée en est déjà convaincue :

- C’est bien pour ça qu’ils nous envoient !

- On n’est pas sorties de l’auberge.

- Au moins, ce sera plus facile du côté de Yuzu.

- Tu parles ! Tu oublies sa fille ! Il y a des péripéties en perspective !

Litsée émet un petit rire :

- Oui, mais je pensais aux ascendants en disant ça ; il n’y a plus grand monde de ce côté-là.

Néroli hausse les épaules en riant :

- Oh, écoute, on verra bien ! On ne va pas se mettre la rate au court-bouillon à l’avance !

Un bref silence s’installe. Une idée traverse soudain l’esprit de Litsée ; elle adresse un regard complice à Néroli :

- Et si on y allait ensemble ?

Néroli soupire :

- J’aimerais bien… Mais ce n’est pas prévu comme ça, répond-elle d’une voix douce.

Litsée a du mal à cacher sa déception. Néroli pose la main sur son genou avec tendresse :

- Mais je serai là quand même !

Listée grimace douloureusement :

- Je sais… Mais j’ai un peu la trouille… Si au moins Sirius pouvait m’accompagner…

Néroli esquisse une moue dubitative :

- Je ne sais pas… On pourra toujours le lui demander tout à l’heure quand il va nous faire sa petite visite.

- D’accord.

§§§

   Plus tard…

Sirius surgit d’on ne sait où.

- Oh ! Les filles ! Toujours à papoter ?

Une fois les retrouvailles célébrées dans l’enthousiasme, le trio s’installe confortablement sur la mousse, au pied d’un grand chêne majestueux. Sirius s’empresse de donner des nouvelles de Rose totalement accaparée par ses nouvelles amours.

- Elle est heureuse, ça fait plaisir à voir. Elle a complètement oublié que ce ne sera pas toujours facile. Tout le monde oublie. C’est la vie !

Néroli intervient, curieuse :

- Et toi ? Tu as un nouveau projet à ses côtés ?

- Oui, mais ce n’est pas pour tout de suite.

Litsée profite du silence qui suit :

- Tu sais, Sirius, je me disais que tu pourrais peut-être venir avec moi.

Sirius la considère d’un air sincèrement désolé :

- Non, hélas, ce n’est pas encore possible. J’ai des obligations… On en a tous et moi-même, si je reste attachée à Rose… A vous… je devrai attendre encore un peu avant de vous rejoindre. Tu sais bien qu’on ne fait pas ce que l’on veut.

Litsée a beau s’y être préparée, la réponse de Sirius la laisse déçue. Le trio sombre dans un silence pesant.

Quelques instants plus tard, un garçon plein d’enthousiasme vient à leur rencontre :

- Oh ! Lili ! Mon départ est enfin programmé !

En quelques bonds, il rejoint Litsée et s’accroupit à ses côtés :

- Si tu savais ce que je suis impatient ! On va encore bien s’amuser ensemble !

Litsée lui adresse un regard sombre :

- Saro, tu oublies une chose : moi, je n’avais pas du tout envie de ça… On m’a forcé la main.

Saro accuse le coup avec humilité :

- Mais j’ai changé, tu sais… J’ai appris.

Litsée s’impatiente :

- Oui, ben on verra. Tu ne vois pas qu’on parle avec Sirius ? Tu nous déranges, là !

La mine boudeuse, le garçon se redresse et s’éloigne, le dos voûté. Sirius le suit des yeux avec un petit sourire énigmatique.

- Tu ne le ménages pas, commente-t-il sobrement.

Litsée se défend avec ardeur :

- Non. Je n’ai pas intérêt ! Je sais comment il est. Et puis tu sais bien que je ne voulais pas m’y recoller avec lui ! Il m’en a fait baver, quand même !

- Oui, mais toi, tu sais que ton travail avec lui n’est pas terminé.

Elle grogne :

- Je sais.

Sirius hoche la tête :

- Et cette fois, il ne tiendra qu’à toi d’en finir pour de bon.

Elle sert les dents.

- Je sais. Compte sur moi.

Néroli se redresse en soupirant. Quelque chose l’intrigue depuis longtemps ; il faut qu’elle en ait le cœur net :

- Sirius… Toi qui guides si bien les humains… As-tu déjà été l’un d’eux ?

Le regard de Sirius se perd dans le lointain :

- Il y a longtemps…

- Tu n’as plus envie ?

- Pas pour l’instant.

- Pourquoi un chien ?

- Pour l’amour inconditionnel.

Une tendresse infinie brille dans le regard de Sirius.

- Les animaux, eux, savent ce que c’est, ajoute-t-il.

- Pourtant, leur sort n’est pas forcément enviable auprès des humains, remarque Litsée.

- J’essaye de bien choisir ! Répond Sirius avec un petit clin d’œil facétieux.

- Tu as déjà choisi d’être un chat ?

- Oui, et ma foi, je recommencerai volontiers ! Le chat est libre. Le chien ne l’est jamais.

- Les chats… Quelle leçon ont-ils à apporter aux humains ?

- L’art de profiter de l’instant présent ! Et aussi, contrairement au chien, celui de s’aimer, de se choisir. C’est important aussi...

Litsée et Néroli ont savouré les paroles de leur ami avec délectation, comme toujours. Il va devoir partir ; la séparation, même provisoire, est toujours un peu triste.

- Tu nous accompagneras toujours ? Partout ? Demande Litsée.

- Toujours. Partout.

- Mais comment allons nous te reconnaître ? S’inquiète Néroli.

- Moi, je vous reconnaîtrai. Et je saurais vous le faire comprendre.

§§§

Une nouvelle fois, Litsée et Néroli sont réunies sous le chêne majestueux à l’orée de la forêt.

- J’ai fais ma petite enquête, tu sais, confie Litsée. On va devoir alléger le fardeau de la famille. On ne sera pas trop de deux pour faire ce travail. C’est pour ça qu’il est prévu que nous restions ensemble.

Néroli approuve :

- Oui, j’ai bien compris qu’on n’allait pas avoir une vie tout à fait « normale », si l’on peut dire comme ça. Disons que nous allons devoir cultiver notre différence, assumer une certaine marginalité.

- Rose est là pour nous y préparer.

Néroli sourit :

- Ça va changer de la vie de couple, des enfants, et tout le toutim ! Très bien ! Et puis j’aime bien cette idée de partager le même objectif toutes les deux, parallèlement à notre mission personnelle. C’est encourageant !

- Sûr qu’il faut bien ça pour envisager de tout reprendre à la base ! Retourner à l’école ! Non mais, tu te rends compte ?

Elles éclatent d’un rire joyeux.

- J’ai hâte de retrouver Rose et Yuzu, déclare Litsée en retrouvant son sérieux.

- Moi aussi ! Et à moi, le temps va sembler long avant de vous rejoindre. Heureusement qu’il y aura Vanille et Jasmin.

Néroli marque un temps de pause, soucieuse :

- Ils n’ont pas choisi la facilité, tous les deux… Surtout Jasmin. Tu vois, finalement, heureusement qu’on oublie tout ! Ça doit être horrible de savoir que tu vas être malade, ou handicapé, ou que tu n’arriveras jamais à l’âge adulte ? Pourquoi on choisit des « trucs pareils » ?

Litsée hausse les épaules :

- Tu le sais, on l’a tous fait, dans une vie ou dans une autre. Et plusieurs fois, sans doute. A toi aussi, c’est forcément arrivé. Tu avais ce travail-là à faire pour grandir ; ou alors, c’était tes parents, ton entourage, qui étaient appelés à progresser à travers ton épreuve. Jasmin a choisi. Sa mère, Marjolaine, aussi… Tout comme son futur père.

Néroli grimace :

- C’est difficile.

- Oui… C’est comme ça. Les rôles sont différents à chaque fois. Certains nous apportent plus de joies que d’autres. Mais nous en sortons toujours grandis. C’est ça, le but.

- Je sais tout ça. Mais au seuil du grand saut, on « mouline » un peu !

- Ce n’est pas moi qui vais te dire le contraire !

Après un court silence, Néroli relance la conversation, curieuse :

- Tu as choisi de travailler quel domaine, toi ?

- Transmettre, répond Litsée sans hésitation. Transmettre et éveiller.

- Moi aussi ! Et témoigner !

- Aussi, et soigner.

- Ah non, pas moi. Mais développer ma spiritualité, oui…

- On fera ça ensemble !

- Ce sera génial.

- Moi, j’ai soif d’apprendre ! Déclare Litsée avec ferveur.

- Sirius m’a confié l’autre jour ce que l’on attendait de nous… Nous allons devoir tout mettre en œuvre pour intensifier la Lumière autour de nous, participer activement à l’élévation des énergies pour l’entrée dans la nouvelle ère. Nous ne pouvons pas rater ça… Nous devons aider de notre mieux pour faire émerger un nouveau monde d’Amour, de Paix et de Joie. Ah, l’Amour inconditionnel ! Sirius nous apprendra. Il m’a dit qu’il aurait un grand rôle à jouer dans notre éveil spirituel. Il sera toujours notre guide. Tout autant que Rose et Yuzu.

§§§

Litsée se prépare au grand départ. Depuis quelques temps, elle fait de fréquents aller-retour pour découvrir et s’accoutumer à son futur « chez elle », à sa famille. Elle raconte à Néroli, la grande maison, le vaste jardin, promesse de partie de jeux interminables, l’entreprise familiale partagée avec la sœur aînée, Marjolaine, la première fille de Yuzu. Elle est très enthousiaste, même si la perspective de la séparation gâche un peu son plaisir. Elle sait déjà qu’elle va recevoir beaucoup d’amour, la base la plus solide pour bien grandir. Il y aura aussi la musique, la fantaisie, le non-conformisme, le sport, la nature, l’humour, les animaux, un sacré cocktail de positivité pour s’épanouir en dépit des vicissitudes inévitables de la vie. Litsée est irrésistiblement attirée… Mais parfois aussi, l’appréhension du changement est plus forte. Elle angoisse, menace de renoncer. Néroli l’encourage. Alors elle persiste.

Ses séjours vont devenir insensiblement de plus en plus longs. Jusqu’au jour J. Néroli est fataliste. C’est le processus normal. Il en sera de même pour elle dans quelques temps. Mais ce sera plus facile ; elle ne laissera presque personne derrière elle, elle. Vanille va bientôt partir à son tour. Il ne restera alors que Jasmin, et quelques autres avec qui elle a déjà « joué » une ou plusieurs « pièces » et qu’elle retrouvera ici et là, au fil de sa future aventure. Et il y aura surtout encore et toujours Sirius qui ne cessera jamais de faire la navette d’une dimension à l’autre.

Tout est en place. Le décor est dressé et les personnages possèdent leur rôle sur le bout des doigts ! Ah oui, mais il y a ce fichu « oubli » qui laisse la part belle au libre arbitre, aux tâtonnements, aux erreurs d’aiguillage, prévus ou non… Au « hasard » ! Le « hasard est l’ombre de Dieu » dit le proverbe arabe. Il faut trouver sa voie, sa mission, prendre conscience de ses dérapages et redresser la barre pour retrouver Le Cap. C’est tout l’art de la vie : accomplir ses missions avec la Lumière en filigrane et briller, rayonner comme un phare dans la tempête pour faire triompher l’Amour, la Paix et la Joie.

Frédérique

Précision, le texte est protégé par Copyright, il ne peut donc être copié et partagé !

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4 avril 2021 7 04 /04 /avril /2021 19:53

Lorsque nous nous sommes lancées ce défit avec Frédé d'imaginer puis de co-créer notre idéal de vie chacune s'est mis à la tâche de son côté.

Voici donc ce que sera ma vie !

Si vous saviez ce que je me sentais pleine de joie, hier soir après avoir mis le point final à ce récit !

C'est juste qu'en fait ... je le vis déjà !

 

C’est aujourd’hui demain !

Il pleut et pourtant je sais que cette journée ne va pas compter « pour du beurre » !

Depuis plusieurs mois nous n’avons pas ménager notre peine et aujourd’hui nous pouvons enfin nous dire « ça y est, on l’a fait ! ».

Sur la pointe des pieds je gagne la terrasse en bois qui entoure notre cabanon sur trois côtés. Nous y passons le plus clair de notre vie et mis à part pour dormir ou nous éclater au piano, il n’y a pas d’activités qui ne puissent y trouver leur place, même le coin cuisine y a trouvé sa place.

J’attrape à la volée le polaire abandonné la veille sur l’un des fauteuils, mon parapluie et file voir comment nos nouveaux pensionnaires ont passé la nuit, chien et chat collés à mes basques. Hier notre basse-cour a accueilli un couple de Barbarie qu’Amélie et Amélia, nos deux oies regardaient quelque peu de travers hier ! Apparemment tout est calme sur le front, les poules gambadent déjà, notre système d’ouverture et fermeture à batteries solaires fonctionnent parfaitement !

D’un coup d’œil j’embrasse les alentours sans rien noter de particulier puis je m’offre un petit instant contemplatif, accotée au muret de pierres sèches qui délimite l’enclos des moutons. J’ai sous les yeux tout ce qui fait ma joie, la Méditerranée au loin, nos chères Albères, Corbières, Fenouillèdes, Roussillon. Un seul absent, le Canigou ! Mais rien de grave puisque c’est sur ses flans que nous avons donné vie à notre éco-logis.

Quand la grave crise de 2020 a donné le coup de grâce à notre société d’alors, nous avons tant bien que mal tenté de nous adapter. Un petit noyau d’irréductibles complices a vu le jour. Nous ne nous connaissions pas tous mais les amis des amis ne sont ils pas par définition nos amis ?

Nous avions en commun un goût immodéré pour la simplicité, la Liberté. Sans être tous des adeptes d’une vie spartiate, nous savions aller à l’essentiel. Lorsque l’opportunité d’acheter cette immense terrain près de La Bastide s’est présentée, nous n’avons pas hésité, le Ptibus allait y être comme un coq en pâte ! Et puis avec cette histoire de Grand Reset autant liquider nos assurances vie.

Grands randonneurs devant l’éternel nos amis Pignon sont venus découvrir le coin. Ils y ont pris goût et le temps d’un week-end le petit casot que nous avions retapé dès les premiers temps les accueillait. Ce fut ensuite au tour de Claire de nous rejoindre épisodiquement, le temps de nous donner des « cours » de rattrapage en matière de maréchage. Notre vieille canadienne reprit du service jusqu’aux premiers frimas.

Dans la joie et la bonne humeur, nous nous sommes prises à rêver !

Pourquoi ne pas revisiter le concept de l’éco-village ?

Nous avons pris conseils auprès de Marie et Roger que nous retrouvons parfois au sein de leur habitat partagé à Los Masos. Petit à petit les choses ont pris tournure et l’idée de notre cabanon a fait son chemin. Depuis des années nous en avions les plans en tête. Conçu comme les huttes norvégiennes, c’est notre cocon ! Poêle en fonte, panneaux solaires, nous avons tout le confort ! Chacune de nous y a son espace, lit douillet et rangement minimaliste, tout est à portée de main, comme dans le fourgon. D’ailleurs ce dernier continue vaillamment à nous balader, jamais bien loin, souvent pour aller faire un tour à Saint Genis où nous avons toujours notre maison et le jardin ! Nous n’avons pu nous résoudre à les vendre, comment aurions nous pu abandonner notre olivier ! Lorsque nos réserves financières ont été liquidées pour donner vie à notre rêve, la solution idéale s’est imposée comme une évidence !

Aujourd’hui, Claire y vit et c’est parfait !

Le « Cortal » comme nous l’avons appelé est devenu petit à petit le point d’ancrage d’amis chers. Son nom s’est imposé immédiatement, clin d’œil à Alice notre amie de papier née d’un roman de Frédérique « Moi aussi j’existe ». Si elle n’a aucune existence légale elle est pourtant bien présente dans notre vie, je ne serais même pas étonnée de la voir un jour débarquer !

Notre casot s’est considérablement agrandi sous la houlette de Brice, au cours de chantiers participatifs organisés avec ses élèves du Lycée professionnel où il travaille à mi temps. Claude et Michelle l’occupent le plus clair du temps. Une première roulotte a fait ensuite son apparition lorsque Martine s’est finalement décidé à quitter sa maison de Sorède.

Aujourd’hui une seconde arrive et sera le port d’attache d’un jeune menuisier ébéniste rencontré à Couiza. Outre des chantiers prévus sur les villages des contre-forts du Canigou, il a quelques créations en tête qui viendront agrémenter l’étal de notre petite boutique. Je lui ai déjà passé commande d’un prototype destiné à contenir mes flacons d’Hydrolat !

Il n’est pas impossible qu’une troisième et dernière roulotte vienne compléter notre « cheptel », entre les visiteurs occasionnels ou un nouveau résident venant dynamiser et pérenniser notre éco-logis, tout est possible !

Pour lors nous misons tout sur notre épicerie multi-services !

Nous y proposons les fruits et légumes de producteurs locaux, ceux que Claire nous monte régulièrement. Avec Martine, Michelle nous sommes quatre à garnir le coin « conserve maison », quant à Frédérique elle s’est lancée dans la production hebdomadaire de pain maison à bonne échelle ! Un pain rustique cuit dans un vrai four à bois construit dans les règles de l’art. Pour ma part je distille à tour de bras et mes hydrolats se vendent comme des petits pains. L’association avec de petits producteurs locaux installés sur le Conflent fait merveille, les hydrolats de Ciste, d’Hélichryse, de Mentha Spicata et de Laurier Noble sont les produits phare de l’épicerie du Cortal !

Tout est donc bien, beau et bon et si globalement toute l’économie s’est effondrée, nous ne regrettons rien. Nous avons depuis 2020 fait une croix définitive sur les voyages au long cours, ni train, ni avion. Notre horizon s’est sans doute restreint mais ayant su anticiper nous avons pu nous adapter sans grande difficulté. Bien évidemment, il y a dans nos relations ceux qui nous servent l’éternelle litanie des « vous avez de la chance ». Nous ne nous fatiguons même plus à tenter de leur faire comprendre que nous avons quand même œuvré en ce sens et que tout ne s’est pas fait sans effort ! Je ne parlerai pas des nostalgiques du monde d’avant, aigris certains vont même à nous rendre responsables de l’effondrement de leur ancienne vie ! Comment n’ont ils pas compris que nous avions épuisé la planète, que nous foncions dans le mur !

Me voici partie bien loin de l’instant présent quand un bruit de galopade me ramène ici et maintenant. Notre roulotte arrive !

C’est la fête, la vie est belle et les cailloux sont en fleurs !

Merci.

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4 septembre 2020 5 04 /09 /septembre /2020 20:22
Cette nouvelle n’est pas vraiment une fiction, monsieur Laguépi existe bel et bien, tout aussi mal aimable, il a en effectivement quitté la Résidence un beau jour, à sa demande, non sans avoir fait parler de lui une dernière fois nécessitant l’intervention d’une famille de résident (nous ! vous l’aurez deviné).
Nous étions quelques uns à assister à son départ et c’est en le voyant monter dans le taxi, sac plastique et petite mallette à la charge de l’ambulancier, lippe boudeuse, que je me suis imaginée son retour au domicile …
La suite n’est malheureusement que fiction !
Nous ne l’avons jamais revu ! Pauvre femme !!!
Dominique
Madame Octave Laguépi.
Le taxi ambulance vient de se garer devant le 13 de la rue des mimosas. Le chauffeur, un petit homme baraqué et basané en sort et d’un pas paisible se porte vers l’arrière du véhicule. Les portes s’ouvrent libérant un plan incliné à l’extrémité duquel se profile la silhouette massive d’un homme âgé tassé dans un fauteuil roulant. En quelques secondes, ce dernier se retrouve sur la chaussée, un sac plastique volumineux posé à ses pieds.
Toujours aussi paisible, l’ambulancier contourne le véhicule et par la portière côté passager, attrape un petit sac de voyage qu’il se met à l’épaule avant de retrouver l’homme au fauteuil.
Si le chauffeur est calme, il n’en est pas de même du vieil homme qui s’agite sur son siège et ne semble pas du tout apprécier de se voir remettre le sac plastique sur les genoux.
Le tandem s’achemine vers le portail vert sur lequel une plaque en marbre indique le nom de la villa ! Les géraniums !
L’ambulancier délaissant provisoirement son patient, cherche une quelconque sonnette pour signaler leur présence. Rien !
Il tente alors d’ouvrir le portail qui résiste puis s’entrebâille légèrement sous la poussée, libérant le passage à un chat à peine pressé de quitter les lieux. De son fauteuil, le vieux monsieur invective le félin qui, de son côté, semble complètement indifférent à cet assaut verbal. Il poursuit son chemin, queue dressée, échine ondulante, en quête d’un autre coin où poursuivre sa sieste.
  • « Bon, ça vient, c’est long ! » s’impatiente le bonhomme la lippe boudeuse.
  • « Excusez-moi, mais il semble n’y avoir personne » rétorque l’autre.
  • « Arrêtez de dire n’importe quoi, elle doit être derrière, allez-voir ! »
  • « Elle, qui, elle ? »
  • « Mais enfin, ma femme ! qui voulez-vous d’autre ! »
L’ambulancier pénètre dans le jardin. Tout à fait le style qui lui fait peur, petites allées gravillonnées, massifs étiques entourés de plaques de béton, une végétation sous surveillance qui, ceci dit, n’a pas dû voir le jardinier depuis quelque temps.
L’arrière du pavillon, n’est pas plus accueillant, volets fermés, fils à linge nus, salon de jardin remisé sous une pergola noyée par la végétation. Perplexe et vaguement inquiet, l’homme revient près de l’entrée et se résout à héler un éventuel occupant des lieux, histoire de dire qu’il n’aura rien laissé au hasard.
Pas de réponse !
D’un regard circulaire, il balaie les environs espérant voir arriver la propriétaire des lieux, en vain. Au moment où il retourne vers son ambulance pour tenter de joindre le secrétariat de la maison qui l’emploie, le vieil homme l’attrape avec violence par le bras et commence à l’insulter. Comme s’il était pour quelque chose dans la situation.
  • « Bon, écoutez, y’a personne, ça crève les yeux ! »
  • « Comment ça, personne, c’est pas possible, vous n’êtes qu’un bon à rien, j’t’en foutrais moi ! personne ! »
L’ambulancier attrape son téléphone lorsqu’une femme à bicyclette s’arrête à leur hauteur. Manifestement elle connaît bien son client mais sa vue semble la laisser interloquée.
  • « Monsieur Laguépi ?, qu’est-ce que vous faites là ? »
  • « A votre avis ! ça se voit, non ? »
L’ambulancier s’est approché et entame la conversation mais alors qu’il s’attend à ce que de la discussion jaillisse la solution à son problème, c’est tout le contraire qui se produit. Madame Octave Laguépi est partie. Où ? Mystère ! La cycliste n’en sait rien, tout juste apprend-elle aux deux hommes qu’un camion de déménagement était là la veille et que sitôt son départ, madame Laguépi est partie dans sa petite auto !
Frénétiquement le chauffeur pianote sur le clavier de son mobile. Il a perdu son flegme et s’emmêle un peu dans les explications qu’il donne à la secrétaire qui gère le staff d’ambulances. Finalement, après avoir attendu de nouvelles instructions, il revient vers son patient qui bout de rage sur son fauteuil.
La cycliste a disparu et rien ne bouge dans la rue.
  • « Bon, je vous ramène à la Résidence »
  • « Mais il n’en est pas question, je rentre chez moi ! »
  • « Et bien vous rentrerez avec quelqu’un d’autre, pour moi, c’est fini !
D’un geste large, monsieur Laguépi vide le contenu du sac plastique sur le trottoir, libérant un vestiaire hétéroclite que l’ambulancier se dépêche de ramasser avant de faire réintégrer l’ambulance à son acariâtre passager.
A la Résidence la consternation est totale.
Monsieur Laguépi ! Le retour ! Ta, da, da, dam !
Personnel, résidents n’en croient pas leurs yeux. Quant à monsieur Laguépi, il ne décolère pas et est bien décidé à rester cloîtré dans sa chambre.
Martine, la secrétaire, qui cherche à joindre l’épouse en fuite, mais tombe systématiquement sur la boîte vocale de la messagerie, accepte toutes les suggestions !
Le problème est que depuis son entrée chez eux, ce résident n’a jamais reçu de visite mis à part une seule et unique de son épouse justement. Les renseignements fournis lors de son entrée font certes état d’un fils mais sans adresse. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin.
Alain, le seul aide-soignant de sexe masculin des lieux, propose son aide. Il va tenter de savoir auprès du père où vit le fiston ! Sa proposition est accueillie avec joie par ses collègues féminines qui d’une manière générale limitent leurs interventions auprès de ce vieil homme au strict nécessaire.
Grognon, pour ne pas dire plus, à son arrivée, chacun pensait que son attitude changerait lorsqu’il se serait habitué. Son côté emporté avait également été remarqué par certaines familles de résidents. L’une d’elle avait même noté que chaque jour à la même heure, évidemment au moment de la pause du personnel, l’occupant de la chambre 74 appelait ! En fait très vite il s’était rendu antipathique auprès de quiconque. Il parlait aux femmes comme à des chiens, jamais de merci ou autre formule de politesse. Tout devait être fait à la minute et si personne parmi les aides-soignants étaient disponibles, les visiteurs étaient mis à contribution sans ménagement ni remerciement.
Dans un premier temps, on l’avait plaint. Comment s’étonner qu’il soit aigri si sa femme ne venait pas le voir ! Puis un jour il avait levé la main sur l’infirmière et ce fait d’abord isolé s’était reproduit. En fait, il leur avait tout naturellement annoncé que cogner était dans ses habitudes mais qu’il les préviendrait, un sacré plus par rapport à sa femme qui n’avait pas droit aux sommations ! Il n’avait absolument pas conscience de la gravité de ses gestes et que dénoncé il aurait été sous le coup de la justice.
Autant dire que la nouvelle de son départ les avait enchantés même si chacun avait eu une pensée émue pour son épouse. Elle n’avait pas soufflé longtemps !
A peine un petit trimestre !
Deux jours plus tard, le fils, localisé à Bordeaux grâce à l’intervention d’Alain, entre à la Résidence. Il annonce immédiatement la couleur au directeur de l’établissement. Il sait où est sa mère mais ne dira rien et il hors de question qu’il prenne son père chez lui. Par contre il ne se fait pas prier pour raconter l’extravagante fugue de sa mère. Il y a 8 jours, lorsqu’elle a appris que son mari voulait rentrer au domicile conjugal et que l’on ne pouvait le contraindre à rester à la Résidence, son sang n’a fait qu’un tour. Jamais plus, elle ne revivrait l’enfer qui a été le sien auprès de cet homme suffisant et plein de morgue. Elle a pris goût à la liberté, retrouvé l’estime de soi et si elle n’a jamais divorcé pour plein de raisons qui ne lui paraissent plus justifiées, il est hors de question de se laisser de nouveau écraser. Le lendemain de l’annonce du retour de son époux, elle cherchait le garde-meuble qui allait pouvoir se rendre disponible le plus rapidement. L’affaire entendue, ayant prétexté des problèmes de santé pour retarder le retour d’Octave Laguépi, deux jours plus tard elle quittait ce pavillon où elle avait connu le pire. Il serait toujours temps de venir récupérer le mobilier qui lui était cher, le principal tenait dans sa petite Micra. Une amie allait l’accueillir le temps pour elle de se retourner.
Feu madame Octave Laguépi avait vécu, madame Joséphine Laguépi avait de beaux jours devant elle. Fini pour elle d’effacer jusqu’à son prénom de son identité, elle avait récupéré le sien et d’ici quelque mois elle aurait repris son nom de jeune fille.
Le fils vient de repartir, il n’a même pas voulu voir son père qui va rester encore quelque temps à la Résidence avant d’intégrer une autre maison de retraite. Cette décision est imposée par le directeur qui a invoqué un problème de place. Après tout, le départ d’Octave Laguépi avait libéré une chambre qui aurait très bien pu être immédiatement occupée, la liste d’attente n’est pas une vue de l’esprit !
C’est ce motif qu’il vient d’avancer à Octave. Ce dernier n’a pas pipé mot, il a regardé par la fenêtre, tourné son fauteuil et demandé qu’une « fille » vienne le chercher pour le conduire à table.
Point final.
Dominique
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14 août 2020 5 14 /08 /août /2020 06:55

Dans la vraie vie, Pierre nous a quittés il y a presque 2 ans maintenant et si pour lui les choses ne se sont pas passées ainsi hormis le grand bazar qui régnait chez lui, ce récit n’est pas pour autant une fiction. D’autres n’ont pas eu sa chance et leurs vécus m’a inspiré cette nouvelle ! Lorsque nous allions régulièrement aux Valbères auprès de Jeannine que de fois avons nous été attristées et scandalisées de constater avec quelle légèreté les anciens étaient traités par leur propre descendance ... Monsieur C. « placé » par son fils en maison de retraite, un fils qui s’était dépêché d’occuper la maison de son père. Yvonne qui ne voyait son fils que le jour de son anniversaire, à lui ! Nos oncle et tante, à l’époque où nous vivions à Paris, victimes d’une mise sous tutelle abusive !

Le grand âge ne protège de rien et surtout pas de la cupidité !

Jeannine qui bien que flirtant avec les 95 ans avait remballé la doctoresse et ses questions à la gomme … du genre à quelle heure le train x croisera le train y sachant qu’il y a eu un retard … Nonagénaire mais pas gaga pour autant !

Finalement je suis effarée de voir que l’on écoute avec plus de sérieux un marmot de 3 ans qu’un aïeul de 90 !

Il n’y a pas de limite d’âge pour aimer la vie !

Alors voici !!!

Dominique

Vive la vie

La voiture vient à peine de s’arrêter à sa hauteur que Pierre a déjà franchi la courte distance qui le sépare de la portière, côté passager. Jamais encore il n’avait fait d’auto-stop ! Pour un coup d’essai, c’est un coup de maître ! A peine le pouce levé et le voilà prêt à embarquer.

Sûr et certain que le jeune couple qui vient de le charger n’imagine pas que ce vénérable grand-père est un fugueur !

Serrant sur ses genoux sa sacoche en cuir, le voilà qui se répand en explications, que personne ne lui demande, puis aussi soudainement se ferme comme une huitre, concentré sur la prochaine étape de son équipée.

Déposé par chance au centre du village, il se hâte de gagner la consigne de la gare SNCF où l’attend déjà son bagage. Le cœur battant à tout rompre, il se dirige ensuite vers les bornes de compostage.

Finies les répétitions, voici la générale tant attendue.

Mais alors que depuis des jours il ne vit que pour ce moment, à l’instant où le train entre en gare une hébétude totale le saisit. Bousculé par un petit groupe de voyageurs, sa valise lui échappe. Il tente fébrilement de la récupérer quand une poigne ferme l’attrape par le coude. Une petite brunette vient de rattraper sa valise et d’autorité l’entraîne vers le train.

Quelques secondes plus tard, de la fenêtre du TER, il voit enfin s’estomper ce qui fut si longtemps son cadre de vie.

A 80 ans bien sonnés, il a pris le chemin de la liberté.

Que ceux qu’il laisse derrière comprennent ou non son choix n’a plus d’importance, le cauchemar de ces quelques mois écoulés appartient au passé.

Veuf depuis une petite année, il avait peiné à refaire surface. Celle qui partageait sa vie depuis tant d’années lui avait fait faux bond en quelques semaines lui ôtant le goût de vivre. Pourtant petit à petit il avait repris du poil de la bête, la solidarité du voisinage y étant pour beaucoup. Chacun s’était ingénié à ne jamais laisser passer une journée sans croiser sa route. Une pâtisserie dont on lui offrait une part, un prêt de livre sur un de ses sujets préférés, quelques fruits ou juste un moment de bavardage, comme ça, pour ne rien dire …

A son insu, il avait repris ses habitudes se laissant même séduire par ce qui auparavant était le domaine de sa femme, l’informatique !

Il bricolait ici ou là pour les voisins qui en retour l’emmenaient faire quatre courses, mais son plus grand plaisir était de jouer la « nounou » pour les chiens du quartier. Il dépannait même pour plusieurs jours les familles qui ne pouvaient ou ne souhaitaient pas voyager avec leur animal.

Le ménage était son point faible et son plus gros défaut de se laisser submerger par les objets. A l’entendre tout était toujours comme neuf et pouvait servir. Allez comprendre pourquoi son aide-ménagère ne partageait pas son point de vue ? Par contre il était l’homme providentiel pour tous les bricoleurs du quartier.

Savoyard de naissance, Pierre avait quitté ses chers sommets, en pleine jeunesse, pour l’amour de Marie et cela faisait bien dix ans qu’il n’avait pas remis les pieds à Chamonix. Il avait encore quelques connaissances et depuis sa renaissance, l’envie de les retrouver le tenaillait. Il y avait cependant un gros obstacle à surmonter pour faire de son rêve une réalité, l’ingérence de ses enfants dans sa vie.

Pierre avait de plus en plus souvent la désagréable impression d’être redevenu petit garçon et admettait difficilement de vivre sous leur regard. Jadis fondé de pouvoir, il s’accommodait mal de leur intrusion dans ses affaires. Si encore ils avaient su répondre présent au moment où la solitude lui pesait le plus !

Et puis il y avait eu la visite de sa fille, un jour à l’improviste, une petite phrase lancée, comme cela, mine de rien.

Entrer en maison de retraite !

Et quoi encore ?!

Complètement chamboulé, il avait filé chez ses voisins où il se savait le bienvenu.

Comme d’habitude les Lauzet ne lui avaient pas fait défaut. Pratiques, ils l’avaient écouté puis l’avaient aidé à rechercher et lister ce qui indisposait le plus ses enfants. Un plan d’attaque avait été élaboré.

Cela avait commencé par un grand ménage côté jardin, histoire de soigner le décor, de gagner du temps. Le voisinage d’abord interloqué par cette soudaine activité, avait apporté son concours, participant activement aux rotations sur la déchetterie.

Ensuite pour l’aider à se protéger au mieux et vivre comme il le souhaitait, même fleurant les 85 ans, il en avait le droit, Pierre avait rencontré le notaire de ses voisins venu à leur domicile. Ce premier pas vers la liberté avait failli tourner court lorsque le fils de Pierre avait frappé à la porte des Lauzet inquiet de l’absence de son père. Gentiment sermonné, ils lui avaient rappelé que son père était un grand garçon et histoire de faire diversion inventèrent un bricolage bidon chez des relations communes.

Ce soir là, Pierre se coucha plus détendu, la donation de leur maison faite à leurs enfants du vivant de Marie, n’était pas un obstacle à son désir de liberté. S’il ne pouvait plus en disposer à sa guise, il en conservait la jouissance et l’usufruit. Occuper comme Perette à tirer des plans sur la comète, il se voyait déjà couler des jours tranquilles sans quiconque pour le surveiller, c’était sans doute prématuré !

Quelques semaines s’écoulèrent au cours desquelles Pierre commença à prendre discrètement ses marques. Ayant remarqué qu’à chaque visite sa petite fille faisait un tour sur son ordinateur, il s’était obligé à ne rien laisser traîner qui aurait pu trahir la nature de ses projets.

Dans la maison, en apparence le bazar régnait toujours, pourtant les placards s’étaient en partie vidés de leurs contenus, contenus qui s’entassaient dans un garage voisine.

Il y voyait plus clair, ses rêves prenaient corps.

Utilisant le Net pour prospecter, il avait opéré un premier tri et communiqué ses résultats aux chamoniards, mis dans la confidence. Ceux-ci l’avaient orienté vers une résidence dite « sécurisée » où l’un d’eux logeait déjà. La liberté avec une solution de repli en cas de pépin.

Rassuré, ayant déjà sauté le pas dans sa tête, Pierre tardait cependant à arrêter une date pour son grand départ. Deux coups de semonce le réveillèrent brutalement.

Deux visites.

Une qu’il n’attendait plus, l’autre à laquelle il ne s’attendait pas !

Lorsque sa petite fille débarqua avec une galette le jour de l’Epiphanie Pierre tout ému cru qu’elle avait réalisé comme il s’était senti seul, jusqu’à ce que sans détour elle lui demande ce qu’il avait fait des bijoux de Marie.

Rangés, lui répondit-il !

Est-ce la sécheresse du ton qui la dissuada de persévérer, toujours est-il que la jeune femme, sitôt sa part de galette avalée réintégrait sa petite DS pressée sans doute d’aller relater ses déboires. Pierre fit de même et dans l’heure qui suivit, appelait ses amis savoyards pour connaître les éventuelles disponibilités en matière de location.

Une petite semaine plus tard, pas de déception mais après coup une énorme frayeur qui le fit réagir quasi immédiatement.

Le premier entretien avec le notaire de ses voisins lui avait permis de cerner les dangers qui pouvaient éventuellement fondre sur lui. La jeune femme lui avait relaté par le menu les avatars de clients victimes de mises sous tutelle abusives, souvent à la demande de familles pressées de récupérer des biens qu’elles convoitaient. S’il avait réalisé que sans illusion quant à la nature des sentiments qui agitaient bon nombre de ses clients elle se libérait de ses angoisses en lui dressant un tableau plutôt sombre de l’Humanité, il avait quand même reçu le message qu’elle tentait de lui faire passer.

Il s’était déplacé pour la revoir et avait suivi à la lettre ses conseils. Mandat de protection future, certificats médicaux attestant qu’il était sain de corps et d’esprit, changement de domiciliations bancaires ...

Tout était allé vite, l’étau se desserrait ! C’était du moins ce qu’il croyait jusqu’à ce 13 janvier où deux femmes sonnèrent à sa porte. Assistantes sociales, mandatées par le Conseil Général, elles intervenaient à la demande de ses enfants inquiets pour leur père afin de procéder à un inventaire de ses besoins !

Interloqué, Pierre répondit néanmoins du tac au tac qu’il n’avait besoin de rien, hormis peut-être de les voir un peu plus souvent et tourna les talons. Elles lui emboîtèrent le pas. Cherchant du regard où s’asseoir, le canapé étant encombré par un tas de linge à plier, à dessein, il les laissa se débrouiller, leur tournant ostensiblement le dos. Réalisant qu’elles allaient s’incruster, il leur approcha deux chaises mais pris la peine de terminer ce qu’il était entrain de faire à leur arrivée. Ensuite, leur faisant face, il attendit !

Il écouta en silence un bon moment décidé à leur river le clou à la première occasion. Celle-ci se présenta lorsque l’un des deux femmes lui demanda d’un air doucereux quel jour on était !

Il lui répondit mais continuant sur sa lancée leur demanda s’il n’existait pas d’autres tests plus fiables et moins galvaudés pour savoir si les gens chapeautaient ou pas !

La femme bredouilla une vague réponse et farfouillant dans ses documents embraya sur le chapitre santé. Subitement, Pierre sentit que la mesure était comble. Il allait leur coller la preuve sous le nez qu’il était en pleine forme et elles allaient aller se faire pendre ailleurs. Il avait à portée de main les certificats médicaux établis sur les conseils du notaire, attestant de manière irréfutable qu’il ne perdait pas ses boulons, il pouvait même leur en offrir une copie !

Cinq minutes plus tard, les femmes parties, il filait chez ses voisins pour leur raconter ce qu’il venait de vivre. Il ressortit de chez eux déterminé à filer à l’anglaise le plus vite possible, triste de constater qu’il ne pouvait attendre rien de bon de sa propre famille !

Epilogue

Dans le train qui l’emmène à grande vitesse Pierre écoute amusé la brunette lui raconter ses déboires amoureux, ses projets. Une diversion bienvenue car s’il sait pouvoir compter sur les « chamoniards », le constat est quand même amer.

Le ronron du train, la chaleur du wagon l’ont quelque peu engourdi, il se sent flotté puis aussi soudainement que la peine lui a noué le cœur, un soudain bien-être l’envahit … Marie ! Elle est là, il la voit. Sa tignasse brune, l’œil qui rit, pleine d’entrain comme jadis.

Avec la petite brune, la vie lui a rendu Marie.

Un joli clin d’œil pour lui montrer que rien ne finit, il suffit juste d’y croire.

Dominique

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10 juin 2019 1 10 /06 /juin /2019 19:15

Aimer la vie, s'aimer !

1

S'aimer? Emilie s'en était toujours bien gardée. Ne lui avait-on pas seriné dès son plus jeune âge qu'elle se regardait un peu trop le nombril ? Elle avait toujours entendu prôner la nécessité de cultiver l'humilité ; sa grand-mère surtout, ne manquait pas une occasion de lui rappeler son insignifiance. Elle avait donc fini par admettre que, sans doute, elle n'avait que peu d'importance.

Adolescente, ceux que sa famille qualifiait de petits « branleurs » l'avait séduite. En leur compagnie, la vie pétillait, elle avait le sentiment d'exister. Malheureusement son parcours scolaire s'en était ressenti. En fin de seconde, Emilie s'était découvert une passion pour l'horticulture, réalisant qu'elle s'était trompée d'orientation. Que n'avait-elle déclenché en annonçant ce soudain engouement et son intention de passer un bac pro ! Découragée, elle avait baissé les bras et continué cahin-caha sa scolarité. Bac en poche - après la session de rattrapage, ne manquait-on de lui faire remarquer ! - majorité atteinte, elle avait quitté sa famille pour se joindre à un groupe de marginaux qui, eux, ne la traitaient pas comme quantité négligeable.

A défaut d'horticulture, Emilie avait trouvé un emploi de « femme à tout faire » dans une jardinerie. Le salaire n'était pas phénoménal mais lui laissait la possibilité de se payer quelques petites fantaisies, d'autant qu'elle n'avait aucun problème de loyer. Un jour chez l'un, une semaine chez l’autre, elle se constituait un petit pécule et avait vu la vie en rose lorsque son employeur lui avait proposé le studio laissé vacant par le gardien. Cerise sur le gâteau, une des horticultrices, l'avait prise sous son aile, se régalant à lui dévoiler les bases du métier.

Lorsque Juan était apparu dans la vie d’Émilie, sa « tutrice » comme elle se plaisait à désigner Christine, était devenue sa confidente ; cette mère de substitution avait perçu immédiatement le danger que cet homme représentait pour la jeune femme.

Mâle dominant dans la bande, il avait jeté son dévolu sur une Émilie éblouie d'être préférée et prête à tout pour conserver son statut de favorite !

Querelles d'amoureux puis scènes de jalousie s'étaient succédées, cependant la jeune femme finissait toujours pas l'excuser ; au moins était-elle aimée !

Juan ne supportait pas Christine qu'il accusait de chercher à asseoir son pouvoir sur Émilie ; aussi, ne savait-elle comment manœuvrer pour alerter sa jeune amie sans provoquer une crise qui lui aurait fait perdre le contact. Elle avait profité d'un cambriolage survenu à la jardinerie pour lui conseiller de mettre ses quatre sous d'économies sur un compte épargne. L'affaire avait été rondement menée et dans la foulée, Emilie, sans trop savoir pourquoi, avait confié à son amie quelques papiers et documents qui lui tenaient à cœur.

Peu de temps après, Emilie disparut sans laisser d'adresse, désertant son poste de travail, ne prenant même pas la peine de vider entièrement le studio. Ce fut Christine qui s'en chargea ! 

2

La petite famille grimpait vaillamment le chemin qui traçait à flan de coteau sa voie vers l'estive. Rien ne semblait pouvoir venir à bout de la détermination des 2 jeunes garçons fortement motivés par une possible rencontre avec les marmottes. Elles avaient selon toute vraisemblance dû sortir de leur hibernation ! La première halte près du petit lac, lieu de prédilection de ces petits mammifères, était donc ardemment attendue d'autant qu'elle serait l'occasion de casser une petite croûte !

Ils abordaient le dernier raidillon avant le replat qui surplombe la vallée de l'Orry quand le chien stoppa net face à un homme grand et maigre, vêtu en tout et pour tout d’un saroual plutôt défraîchi et d’une paire de rangers.

Il grommela un vague bonjour puis s'enquit d'une manière abrupte de leur destination avant de poursuivre son chemin, apparemment satisfait de la réponse.

- « C'était qui le monsieur ? » demandèrent en cœur les 2 garçons qui venaient de débouler du sous-bois où ils batifolaient.

- « Sans doute un des babas qui viennent ici pour les sources chaudes ! Allez, sus aux marmottes ! ».

- « Pourquoi lui as-tu dit que nous nous arrêtions au lac ? »

- « Ben, c'est vrai ? Non ? Et puis quelle importance ? »

L’en-cas avalé, chaque enfant avait repris son barda, les parents avaient échangé les leurs et la troupe était repartie vers le refuge, dernière halte avant leur but ultime, le vieil orry. Dans son porte-bébé, la plus jeune randonneuse de la bande donnait de la voix, maintenant bien éveillée au grand dam de son père qui en avait hérité.

La vallée venait de dévoiler le sommet pyramidal du Nou Founts quand un concert de sifflets éclata pour la grande joie de tous. Les marmottes s'étaient juste trompées de rendez-vous ! Un dernier effort et la grillade tant attendue était à leur portée. Restait à mener à bien la collecte de pignes, de branchages et à faire le plein d'eau. 

Chacun s'affairait quand un cri étouffé se fit entendre ; la gamine étant scrupuleusement entrain de déguster la flore locale, sa mère n'y prêta pas attention ! Les garçons devaient chahuter. Elle venait de s'asseoir près de sa fille quand le cri se fit entendre de nouveau. Elle attrapa la petite, la cala sur la hanche et s'achemina vers le refuge dont la partie réservée aux bergers était verrouillée. Elle pensait avoir rêvé quand retentirent quelques coups secs  et un appel feutré ! Elle contourna vivement la bâtisse et avisa une ouverture en hauteur.

- « Y'a quelqu'un ? »

- « Aidez-moi ! »

Ne prenant pas la peine de répondre, elle repartit à toute allure, appelant à pleine voix son mari.

- « Y'a quelqu'un dans le refuge qui appelle au secours, là-haut ! T'as rien entendu ? »

- « Si mais je pensais que c'était la petite ! »

Au moment où ils atteignaient la construction, les garçons arrivèrent ventre à terre traînant derrière eux un vieux sac à dos.

- « Regardez ce qu'on a trouvé ! »

- «Lâchez ça, c'est dégoûtant ! Et venez, on a besoin de vous ! »

Quelques instants plus tard, ce qui faisait office de table ayant été placé sous la fenêtre, ils découvraient à l'étage, allongée sur le sol, une jeune femme entravée !

Les évènements s'emballèrent. Il leur fallait s'éloigner au plus vite pour se mettre en sécurité, après avoir toutefois résolu un problème crucial : leur inconnue était pieds nus ! Trop en vue, ils décidèrent d'éviter l'orry et remontèrent le long du torrent pour tenir un véritable de conseil de guerre.

Après avoir tenté de comprendre ce qui avait conduit leur protégée au refuge, un plan d'attaque fut dressé qui, au grand désespoir des garçons, zappait le pique-nique. Premier acte, retourner au refuge pour récupérer le sac à dos trouvé par les garçons et contenant vraisemblablement les tennis de la jeune femme ; autant dire un grand moment d'angoisse ! Acte deux, regagner la civilisation, les communications ne passant pas !

3

En quittant la jardinerie, Emilie et Juan s'étaient joints à un groupe de marginaux qui écumaient la vallée de la Têt et ses multiples sources chaudes. Ils vivaient de petits boulots dans des camping-cars rafistolés ou faisaient la manche. Très vite Emilie tenta de faire comprendre à son compagnon que cette vie ne lui plaisait pas, mais en vain. Elle envisageait de le quitter cherchant avec de plus en plus de détermination comment fausser compagnie à la bande. Mettant à profit les renseignements glanés ici et là, elle tentait de donner le change et croyait avoir endormi la jalousie maladive de Juan quand il lui proposa une virée jusqu'à l'estive, jusqu'à l'Orry. Marcher n'étant pas son truc, elle refusa.

Une volée de coups s'abattit sur elle et c'est dans un état second, terrorisée par la violence qu'elle lisait dans le regard de Juan qu'elle se retrouva sur le chemin qui grimpait au refuge. Arrivés sur place, il la fit monter dans le grenier où les bergers gardaient leurs quelques possessions au sec en saison, la déchaussa avant de l'attacher et de disparaître.

Lorsqu'Emilie eut terminé son récit seul le silence lui répondit ; son auditoire était médusé ! Les garçons furent les premiers à récupérer.

- « On dirait un film de bandits ! » chuchota le plus jeune.

- « Ouais, c'est géant ! »

Un plan fut échafaudé qui n’enthousiasmait pas du tout Emilie : redescendre par le chemin pris à l'aller, au risque de croiser Juan qui, selon toute vraisemblance, était allé récupérer des affaires personnelles. Il fallut lui expliquer longuement qu'il n'y avait pas d'autre solution. Si par malheur ils le croisaient, ce dernier verrait ce qu'il s'attendait à voir : la famille entrevue à l'aller !

En effet, lorsqu'en montée leur route avait croisé la sienne, les garçons étant occupés dans le sous-bois Juan n’avait rencontré qu’un couple avec un bébé et un chien. C'est donc ce même équipage qui allait redescendre !

Au terme d'un long conciliabule ils mirent leur plan à exécution. Les deux femmes échangèrent vêtements et chaussures, la meilleure des « couvertures » étant la fillette dans son porte-bébé dont Emilie venait d'être chargée. Les deux garçons et leur mère allaient emprunter le GR 10 pour atteindre un village plus haut dans la vallée. Le trajet, pas trop technique et présentait l'avantage de rallier un gîte d'étape toujours ouvert où les garçons et leur mère seraient en sécurité. Quant à Emilie et son compagnon d'infortune, histoire de limiter le risque de mauvaise rencontre, ils rattraperaient à partir du lac la piste carrossable, un itinéraire plus long mais offrant une chance de se faire prendre en charge par d'éventuels automobilistes !

Au moment où le couple se mettait en marche, Emilie craqua, terrorisée à l'idée de paniquer et de mettre en danger la vie de l'enfant qu'elle portait ! Lorsqu'elle comprit que le couple ne changerait pas d'avis, elle se résigna et se mit en marche, émue aussi de la confiance qu’on lui témoignait. 

4

Les saisons s’étaient écoulées depuis ce jour mémorable et en ce superbe jour d'automne, de son perchoir, Emilie cherchait à entrevoir la piste où elle avait cru vivre ses dernières heures il y a quelques années, en quittant le refuge avec le bébé dans le dos. Elle avait imaginé une rencontre avec Juan, vaguement envisagé de tomber sur un 4/4 de chasseurs mais en aucun cas ne s'était préparée à croiser l'un des vieux camping-cars lancé à l'assaut de la piste défoncée.

En apercevant le véhicule bariolé débouchant de l'épingle, Emilie s'était statufiée, le cœur battant à tout rompre. Son compagnon l'avait alors empoignée sans ménagement, l'obligeant à continuer la descente tout en manœuvrant pour rester toujours à sa hauteur.

A l'instant précis où ils allaient se croiser, le véhicule stoppa et le chauffeur les héla !

Le cœur aux bords des lèvres, Emilie vit son complice avancer avec détermination vers le camion, non sans lui avoir enjoint de continuer son chemin. Elle s'éloigna les jambes en flanelle, n'osant se retourner, inquiète de voir la conversation s'éterniser. Elle avait reconnu les occupants plutôt du genre excité. Le chien devait le sentir car il grondait, ramassé sur lui-même aux côtés de son maître.

Elle avait progressé d'une centaine de mètres quand une galopade derrière elle lui mit le cœur aux bords des lèvres, elle accéléra le pas incapable de penser.

- « Tu passes le turbo ?! Ils voulaient savoir comment était la piste plus haut. Je les ai rassurés mais y'a un hic, s'ils ne peuvent passer les ornières, on risque de les retrouver derrière nous ! »

- « Qu'est-ce qu'on fait ? »

- « On trace, vite fait, passe moi la gamine. »

Ils avaient avalé un bon bout de piste quand une pétarade se fit entendre derrière eux. Terrorisée, Emilie stoppa net et se précipita sur le bas-côté, l'estomac en révolution, les oreilles bourdonnantes.

- « Elle est malade la p'tite dame ? »

Un gros pick-up venait de stopper non loin d'eux ; un coup de pouce du destin !

En deux temps trois mouvements, ils se retrouvèrent coincés à l'arrière du véhicule au milieu d'un attirail de chasse, non sans avoir dû argumenter pour que le chien n'aille pas rejoindre ses congénères dans la benne !

Ballottés et passablement incommodés par l'odeur fétide qui imprégnait l'habitacle, ils commençaient à tout juste se détendre lorsque, arrivant en surplomb du village, Emilie aperçut le véhicule de Juan, garé devant l’Église.

Une crise de panique la submergea, contraignant les chasseurs, totalement déstabilisés, à les débarquer sur la piste. Ne cherchant pas à se faire préciser ce qui se passait, son partenaire lui fit rebrousser chemin pour atteindre le vieux château où débouchait l'antique chemin menant du village à l'estive, seule autre alternative pour regagner le village en évitant le parking.

A l'approche du vieux clocher républicain, fierté du bourg, il la conduisit dans une petite ruelle où un vieux tilleul ombrageait une minuscule courette, lui confia le bébé et le chien, et partit au pas de course récupérer la voiture. Jamais le temps n'avait paru aussi long à Emilie, son imagination lui inspirant les pires scénarios ; Juan refusant de bouger le camion, jouant des poings … Elle avait fini par craquer, déstabilisant complètement le bébé qui pleurait à fendre l'âme au grand dam du chien qui leur dispensait force coups de langue pour tenter de les réconforter ! 

Epilogue

Le temps avait passé. Les formalités policières bouclées avec l'aide de ceux qui l'avaient secourue, Emilie avait récupéré ses quelques possessions conservées par Christine et quitté la région pour entamer une formation d’horticultrice. Son amie avait joué à fond son rôle de tutrice et une association d'aide aux victimes de violence et son équipe de juristes, psychologues, assistantes sociales l'avaient aidée à se faire confiance. CAP en poche, elle poursuivait son chemin et avait retrouvé avec joie, et douleur aussi, cette famille que la Vie avait placée sur sa route pour l'aider à se découvrir et s'aimer !

Do

 

 

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24 novembre 2018 6 24 /11 /novembre /2018 17:32

Cet été, alors que nous campions sur une île de l’Atlantique, un couple de retraités occupait l’emplacement voisin du nôtre. Au fil des heures et des jours, ils ont été rejoints par ce qui nous a semblé être leur famille, enfants et petits-enfants, tout ce petit monde profitant pleinement de leur séjour au détriment de leurs aînés qui géraient une intendance de plus en plus lourde.

Par ailleurs, un nombre grandissant de personnes de notre entourage se retrouvent aujourd’hui victimes de leurs décisions concernant la transmission de leur patrimoine de leur vivant, lésées par leur propres enfants !!!

C’est ainsi, qu’inspirée par ces situations, j’ai imaginé cette nouvelle, intitulée « Léa et Léo ».

Il faut avouer que j’ai de plus en plus de mal à accepter la manière dont nos aînés sont considérés chez nous, c'est-à-dire avec de moins en moins de respect et de considération. Très marginale en Europe, pour ne pas dire exceptionnelle, la suppression des tarifs séniors dans les musées et autres lieux culturels -qui proposent parfois la gratuité des jeunes jusqu’à 28 ans !- en est la parfaite illustration. Les vieux doivent payer pour les jeunes, c’est clair. Qu’ils se délestent de leur patrimoine au profit des jeunes générations est bon pour l’économie, puisque, c’est bien connu, les jeunes consomment plus que les anciens. Consommez, consommez, mais cependant, enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants, rappelez-vous que séniors ne veut pas dire séniles. Les anciens sont des adultes à part entière qui ont encore le droit de choisir leur vie !!!

 

Pour découvrir la nouvelle, cliquez sur le lien ci-dessous!

https://drive.google.com/file/d/1YntIkR8MOq_EnfmSKSjlYnttVNBFXZpg/view?usp=sharing 

Bonne lecture!

Frédérique

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29 novembre 2016 2 29 /11 /novembre /2016 16:38
Encore un peu somnolente, Mathilde sirotait son premier café de la journée, le regard vague et l'esprit embrumé, lorsque Valentine fit une entrée fracassante dans la roulotte. En s'éveillant, Mathilde avait remarqué la couchette vide et ne s'en était pas étonnée. Sa fille était plus matinale qu'elle-même. Elle avait coutume de se rendre aux écuries et de s'adonner à une petite marche avant de prendre le petit-déjeuner.
- Maman ! J'ai très mal dormi ! déclara la jeune fille en se plantant devant sa mère, le visage plein de reproches et de mécontentement.
Mathilde leva vers sa fille un regard perplexe.
- Pourquoi ?
Avec un soupir, Valentine s'assit face à elle et s'empara de la cafetière pour remplir son bol.
- Je n'en peux plus de cette situation. Il faut que ça bouge, maintenant !
Mathilde vida son bol d'une traite, et fronça les sourcils:
- Mais de quoi tu parles ? Je ne comprends rien...
- Mais je te parle de nous ! On est au point mort, là. Et ça s'éternise. Depuis combien de temps on est dans cette roulotte ? Il n'était pas question qu'on ait un appartement ? C'était une question de deux ou trois mois, maxi. Et là, ça fait combien de temps ?!
- Oui, je sais... Mais on n'est pas mal, là, non ?
- On est pas mal, d'accord ! Parce que le mois d'août s'éternise comme le reste, et que la mauvaise saison n'est pas prête d'arriver à ce train-là; mais il n'empêche que je voudrais bien avancer, moi. Maintenant que je sais ce que je veux faire, j’ai envie de passer aux choses sérieuses, d’aller m'inscrire en fac à Reims, de rencontrer la tante de Samuel pour voir si la cohabitation avec elle est possible... Et puis tiens, par rapport à Samuel, j'ai beaucoup de choses à lui dire, moi. Pourquoi ne fait-il pas attention à moi ? Il faut que j'en aie le cœur net.
Mathilde ne répondit rien, l'air soucieux.
- Et toi ? reprit Valentine, tu n'as pas envie de savoir si le poste de Joigny va te convenir ? Et ce Franz... Il t'a plu, hein ? Ce serait intéressant de savoir si tu vas le revoir, non ? Et puis mine de rien, on a toujours la même épée de Damoclès au dessus de la tête : papa. Qu'est-ce que tu crois qu'il va faire, papa ? Il semblerait quand-même qu'il soit à notre recherche... Moi, je ne peux pas rester comme ça dans l'incertitude, elle n'a pas le droit de jouer comme ça avec nous !
- Qui ça ?
- Mais notre auteure !
- Ah, d’accord…
Le visage de Mathilde s'éclaira ; d'un coup, elle avait compris où sa fille voulait en venir. Mais ses pensées n'étaient pas encore suffisamment claires pour lui permettre d'entamer une discussion constructive. Elle s'empara de la cafetière pour remplir son bol à nouveau.
De son côté, Valentine, avala quelques gorgées de café avant de se couper une tranche de pain, pour la tartiner généreusement de beurre et de confiture pour y mordre à belles dents.
- Ça fait combien de temps qu'elle nous a plantées là, avec tous nos problèmes ? reprit-elle, la bouche pleine.
Mathilde haussa les épaules:
- Un moment...
- Oui, un bon moment. Et ça ne va pas !
- Et qu'est-ce que tu veux faire ?
- Faut lui parler.
- Tu sais comment la joindre ?
- Pas vraiment, mais sur Internet, on doit bien trouver quelque chose sur elle, non ? Elle ne doit pas en être à son premier livre...
- Sans doute; enfin, peut-être. J'espère, en tout cas.
Valentine hocha la tête en prélevant avec férocité une autre bouchée de sa tartine:
- Dès que j'ai fini de manger, je commence les recherches. On va la secouer un peu, tu vas voir. On est responsable de ses créations. Elle nous doit des explications.
Trois heures plus tard, installées dans la salle informatique du domaine d'Epona, la mère et la fille collaboraient efficacement pour en apprendre plus sur leur créatrice. Elles avaient bien avancé. En tapant le nom de leur auteure sur le moteur de recherche, elles avaient découvert un site d'éditions en ligne où figuraient plusieurs de ses ouvrages: cinq, très exactement. Elles en étaient soulagées: leur histoire avait donc des chances d'aboutir, à moins que leur créatrice ne soit une adepte des fins en « eau de boudin »! Mais encore fallait-il trouver un moyen de la contacter.
Soudain, Valentine poussa un cri de victoire:
- Eureka !!! J'ai trouvé un blog !
Mathilde se leva précipitamment pour rejoindre sa fille devant son ordinateur.
- Il n’y a pas de photo d’elle ? J'aurais bien aimé voir à quoi elle ressemble, ajouta-t-elle déçue, en découvrant la photo de « profil », un charmant petit fox-terrier à lunettes.
Valentine avait commencé à faire défiler les parutions.
- Ben dis-donc, il y a pas mal d'articles ! Ça a l’air sympa…
Il y avait effectivement de nombreux articles, d'inspirations diverses : lectures, cinémas, recette, coups de gueule, coups de cœur...
- Bon, si tu commences à lire, remarqua Mathilde en voyant sa fille s'attarder sur un article au sujet d’un film à ne pas manquer, on n'est pas sorties de l'auberge! Tu trouves un contact?
Valentine secoua la tête:
- Je n’ai pas l’intention de tout lire, mais il a l’air bien, ce film ; on aurait pu y aller, vu qu’on n’a pas grand-chose d’autre à faire. Enfin, je crois qu’on doit pouvoir laisser un message sur ce blog...
- He ben, alors allons-y! riposta Mathilde.
***
Comme beaucoup de gens, j’imagine, mon premier travail, lorsque j’ouvre l’ordinateur, est de lire mes mails. Il faut dire qu’aujourd’hui, c’est plus intéressant que d’ouvrir sa boîte à lettres qui ne contient plus, sauf rare exception, que des factures et des publicités. Les mails, c’est plus varié : il y a des « newsletters » auxquelles on ne s’est pas forcément abonné, des publicités, mais il y a surtout pas mal de messages personnels. C’est chouette d’avoir des nouvelles des amis qui sont souvent trop loin. Parfois, mais trop rarement hélas, il y a des commentaires sur le blog. Ça aussi, ça fait plaisir.
Et justement, aujourd’hui, « Overblog » m’informe que j’ai reçu un message. Ma curiosité s’éveille : un message ? Mais c’est encore mieux qu’un commentaire, ça ! Voyons, voyons… Allez, je clique !
« Bonjour !
Ce message va sans doute vous surprendre et nous espérons ne pas faire fausse route en vous l’adressant. Suite à quelques recherches sur le net, nous avons trouvé ce moyen pour vous joindre, en espérant que vous êtes bien la personne que nous cherchons. Est-ce bien vous l’auteur de « Blessures de vie », « Etat d’âmes », « Les moutons noirs » ?... Je sais que nous en oublions, mais cela suffira sans doute à vous identifier ! De notre côté, nous n’avons pas encore d’existence légale, mais nous n’en n’avons pas moins une requête à vous adresser. Nous sommes « les disparues ». Cela fait maintenant des mois que nous avons fui la Bretagne pour venir nous cacher dans ce petit coin des Ardennes où nous ne sommes pas vraiment malheureuses mais où nous attendons en vain de trouver des solutions à nos problèmes. Excusez-nous de vous le dire comme ça, mais nous nous demandons si vous ne nous avez pas oubliées. Nous nous sentons vraiment abandonnées. Autour de nous, tout le monde se demande ce qui se passe, car, comme vous le savez, nous ne sommes pas seules en cause ! Même le temps semble s’être arrêté dans un mois d’août qui s’éternise. Nous ne nous plaindrons pas de ces prolongations estivales, l’hiver ayant la réputation d’être particulièrement rigoureux ici, mais tout de même ! L’ennui commence à s’installer. Il ne se passe plus rien ! Alors, s’il vous plaît, si notre sort vous soucie un tant soit peu, faites quelque chose, reprenez le cours de notre histoire, aidez-nous à avancer. Vous seule pouvez le faire. Nous n’en pouvons plus de cette inaction. Dans l’espoir d’être entendues, et d’avance, avec toute notre reconnaissance,
Mathilde et Valentine. »
Je lis et relis le message, complètement abasourdie. Je n’en crois pas mes yeux. Les disparues. Mathilde et Valentine, les personnages principaux de mon dernier roman, s’adressent à moi par l’intermédiaire du blog, visiblement submergées par un sentiment d’abandon qui ne m’étonne qu’à moitié.
Car depuis des semaines, - oui, peut-être bien des mois-, je me reproche intérieurement mon manque d’assiduité au travail. J’ai bien conscience d’avoir commencé un roman, de m’être interrompue pour partir en vacances, puis de m’y être à nouveau consacrée, avant d’être accaparée par de multiples tâches qui, peu à peu, m’ont éloignée de ma réalité romanesque. Les personnages, devenus si vivants au fil des lignes, un peu comme des amis très proches, ont perdu de leur consistance jusqu’à devenir un lointain souvenir auréolé de remords. Non, je ne les ai pas oubliés. Mis de côté, seulement. De fait, ils ont perdu de leur densité, s’étiolent, s’effilochent, et s’évanouissent dans une dimension à laquelle j’ai de moins en moins accès. Au point de me demander parfois « comment je l’ai appelé, celui-là, déjà ? »… «  Et sa mère, c’est qui, en fait ? ». Comme si je ne les avais pas moi-même créé de toutes pièces, avec leur histoire, leur passé, leur caractère, leurs espoirs et leurs motivations !
Elles ont raison. Accaparée par d’autres projets, plus concrets, je les ai vraiment laissé tomber. Je ne parle pas du blog ; je n’y écris pas beaucoup d’articles. Manque de motivation. Le nombre d’abonnés a beau augmenter régulièrement, il n’y a vraiment pas assez de retour. On a vraiment l’impression d’écrire dans le vide, surtout depuis le départ de Jean Luc, notre fan et commentateur le plus assidu. C’est ça qui coupe les ailes, pour tout : l’absence d’échange et de partage. La circulation est à sens unique.
Alors c’est vrai, je l’avoue, je me suis détournée de l’activité créatrice, ces derniers temps, allant jusqu’à me demander parfois si ça vaut la peine de continuer. Car même si j’ai quelques fans, les refus systématiques des éditeurs traditionnels, ça use. Au fond, il y a peut-être mieux à faire ?
Du coup, je me suis consacrée aux huiles essentielles, passionnant sujet dont on n’a jamais fait le tour, j’apprends le catalan - en réaction à ce choix stupide d’Occitanie pour le nom de notre région !-, j’ai voulu me remettre au piano… Je nage, je marche, je pédale, je cuisine, je tricote, cote, cote ! Et c’est ainsi que je perds de vue mes disparues qui n’attendent qu’une seule chose : être retrouvées !
Stupeur et honte.
Je dois leur répondre au plus vite.
Je pense à elles, souvent ; à elles et à tout ce petit monde qui m’habite et que j’ai choisi d’exposer au grand jour. Je me dois à lui et à mes lecteurs potentiels, même s’ils sont peu nombreux. Je comprends leur inquiétude et leur révolte, et je vais de ce pas reprendre le fil de mon histoire, en essayant de tout concilier : huiles essentielles, catalan, i tutti quanti. L’hiver arrive et avec lui, le cortège des longues soirées au coin du feu. Allez, il y a du pain sur la planche ! Tant mieux.
Vite, je réponds :
« Je vous ai entendues, les filles ! Ne vous inquiétez pas. De fait, je ne vous ai abandonnées qu’à moitié : le synopsis est fait et je sais où je vais, où vous allez. Rassurez-vous, j’ai besoin de vous, comme vous de moi pour exister. Vous allez connaître des jours meilleurs, je m’en porte garante. Et je sais de quoi je parle puisque c’est moi qui décide ! Je crois que vous ne serez pas déçues.
Alors, à très bientôt,
Au fil des mots, au gré des lignes…
Votre auteure dévouée,
Frédérique »
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  • : Nous sommes deux soeurs... L'une peint, l'autre écrit. Nous avons envie de partager nos vécus, nos ressentis, nos expériences; de témoigner... Nous aimons par dessus tout la nature, notre plus grande source d'énergie... Sur ce blog, nous vous présenterons des peintures, des livres, mais aussi des photos de nos voyages, de nos randonnées, des récits... Nous tenterons enfin de vous entraîner dans la grande aventure de notre vie: notre cheminement spirituel vers l'Amour et la Lumière.
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